MUSIQUE & ŒUVRE AUDIOVISUELLE

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L’auteur des compositions musicales, même lorsqu’elles sont spécialement réalisées pour l’œuvre audiovisuelle, n’est pas toujours co-auteur de l’œuvre audiovisuelle

(Cour de cassation, 1e civ., 29 mars 2023, n° 22-13.809) 1e civ., 29 mars 2023, n° 22-13.809)

Par un arrêt du 29 mars 2023, la Cour de cassation vient rappeler que la liste des auteurs d’une œuvre audiovisuelle mentionnés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle ne repose que sur une présomption simple, laquelle peut donc être remise en cause. L’auteur de la musique d’un film publicitaire vient d’en faire récemment les frais.

L’œuvre audiovisuelle est une œuvre de collaboration réalisée par plusieurs auteurs. Parmi ces derniers, selon l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une œuvre audiovisuelle réalisée en collaboration, l’auteur « des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l’œuvre ».

L’œuvre de collaboration se caractérise par une participation concertée et une communauté d’inspiration. L’auteur de la composition musicale d’un film ne peut donc bénéficier de la qualité d’auteur de l’œuvre audiovisuelle réalisée en collaboration que sous réserve d’avoir participé de manière concertée et sous une inspiration commune à la conception de l’œuvre audiovisuelle.

En l’espèce, la Cour de cassation considère que la Cour d’appel de Paris a pu, à bon droit, écarter la présomption simple posée à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle et partant refuser à l’auteur de la composition musicale la qualité de coauteur de l’œuvre audiovisuelle dès lors que « Après avoir rappelé que l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique, elle a retenu que M. [E] ne démontrait ni même n’alléguait avoir pris part à la conception de cette œuvre non sonorisée, qu’il justifiait d’un travail indépendant effectué sur la base de la version définitive du film préalablement réalisé et que la bande son qu’il avait créée avait été incorporée à l’œuvre préexistante, objet de la commande, sans la collaboration de son auteur, M. [Y] ».

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[:frLettre d’information Avril 2023

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Au sommaire :

  1. MUSIQUE & ŒUVRE AUDIOVISUELLE : L’auteur des compositions musicales, même lorsqu’elles sont spécialement réalisées pour l’œuvre audiovisuelle, n’est pas toujours co-auteur de l’œuvre audiovisuelle (Cour de cassation, 1 e , 29 mars 2023, n° 22-13.809)
  2. BOÎTE À MUSIQUE & DROIT MORAL DE L’AUTEUR MIS EN BOÎTE : L’autorisation de la SACEM et de l’éditeur musical n’est pas toujours suffisante lorsque la reproduction d’une œuvre est également susceptible de porter atteinte au droit moral de l’ ‘auteur mis en boîte. Tout dépend des modifications qui en résultent (Cour de cassation, 1 e , 8 mars 2023, n° P 22-13.854)
  3. DROIT MORAL & CHANSONS : Le texte et la musique d’une chanson adaptée de genres différents et sont dissociables, en sorte que le seul fait que le texte ait été séparé de la musique ne porte pas nécessairement atteinte au droit moral de l’auteur ( Cour de cassation, 1 ère , 8 février 2023, n°21-23.976)
  4. AUDIOVISUEL & ACCORDS INTERPROFESSIONNELS : Deux accords interprofessionnels viennent récemment de consacrer des rémunérations minimales au profit des auteurs d’œuvres audiovisuelles (Arrêté du 22 février 2023 portant extension de l’accord du 23 janvier 2023 entre auteurs et producteurs d’œuvres audiovisuelles documentaires relatif à la rémunération minimale globale du dossier de présentation de projets documentaires de 52 minutes et plus ; Accord interprofessionnel sur les pratiques contractuelles entre auteurs-scénaristes et producteurs de fiction)
  5. SPECTACLES & VENTE DE BILLETS SANS AUTORISATION : Tout comme la vente de billets, la fourniture de moyens en vue de la vente de billets sans autorisation du producteur de spectacles est interdite. Google vient d’en faire récemment les frais (Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 1, 29 mars 2023, n° 21/00704)
  6. L’AVOCAT MANDATAIRE SPORTIF & L’AGENT : L’avocat mandataire sportif ne saurait mettre en relation en joueur et un club, intéressés à la conclusion d’un contrat relatif à l’exercice rémunéré d’une activité sportive, ; il ne peut être rémunéré que par son client (Cour de cassation, 1e, 29 mars 2023, n° 21-25.335)
  7. DONNÉES PERSONNELLES & TRANSFERT VERS LES ÉTATS-UNIS : Dans un avis rendu le 28 février 2023, le Comité Européen à la Protection des Données (« CEPD »), prend acte des améliorations à la protection des données personnelles des citoyens européens résultant du nouveau cadre juridique adopté par le Président Joe Biden le 7 octobre 2022, mais dresse aussi la liste des sujets d’inquiétude qui persistent (CEPD, avis 5/2023 du 28 février 2023 sur le projet de décision d’adéquation relatif au cadre des transferts de données personnelles entre l’UE et les Etats-Unis)
  8. ENCADREMENT DES INFLUENCEURS SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX : Jeudi 30 mars 2023, l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (Proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux)

En savoir plus : Lettre d’information téléchargeable en cliquant ICI

  1. MUSIQUE & ŒUVRE AUDIOVISUELLE : L’auteur des compositions musicales, même lorsqu’elles sont spécialement réalisées pour l’œuvre audiovisuelle, n’est pas toujours co-auteur de l’œuvre audiovisuelle (Cour de cassation, 1e, 29 mars 2023, n° 22-13.809)

Par un arrêt du 29 mars 2023, la Cour de cassation vient rappeler que la liste des auteurs d’une œuvre audiovisuelle mentionnés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle ne repose que sur une présomption simple, laquelle peut donc être remise en cause. L’auteur de la musique d’un film publicitaire vient d’en faire récemment les frais.

L’œuvre audiovisuelle est une œuvre de collaboration réalisée par plusieurs auteurs. Parmi ces derniers, selon l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, est présumé, sauf preuve contraire, coauteur d’une œuvre audiovisuelle réalisée en collaboration, l’auteur « des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l’œuvre ».

L’œuvre de collaboration se caractérise par une participation concertée et une communauté d’inspiration. L’auteur de la composition musicale d’un film ne peut donc bénéficier de la qualité d’auteur de l’œuvre audiovisuelle réalisée en collaboration que sous réserve d’avoir participé de manière concertée et sous une inspiration commune à la conception de l’œuvre audiovisuelle.

En l’espèce, la Cour de cassation considère que la Cour d’appel de Paris a pu, à bon droit, écarter la présomption simple posée à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle et partant refuser à l’auteur de la composition musicale la qualité de coauteur de l’œuvre audiovisuelle dès lors que « Après avoir rappelé que l’objet de la commande de la société Dmax à la société Pause B films était la réalisation d’un film publicitaire sans musique, elle a retenu que M. [E] ne démontrait ni même n’alléguait avoir pris part à la conception de cette œuvre non sonorisée, qu’il justifiait d’un travail indépendant effectué sur la base de la version définitive du film préalablement réalisé et que la bande son qu’il avait créée avait été incorporée à l’œuvre préexistante, objet de la commande, sans la collaboration de son auteur, M. [Y] ».

  1. BOÎTE À MUSIQUE & DROIT MORAL DE L’AUTEUR MIS EN BOÎTE : L’autorisation de la SACEM et de l’éditeur musical n’est pas toujours suffisante lorsque la reproduction d’une œuvre est également susceptible de porter atteinte au moral de l’auteur mis en boîte. Tout dépend des modifications qui en résultent (Cour de cassation, 1e, 8 mars 2023, n° 22-13.854)

« Ayant constaté que la mélodie produite par les boîtes à musiques litigieuses était un arrangement musical dénué de paroles constituant une simplification extrême de la mélodie originelle, qu’elle variait nettement en fonction de la vitesse et pouvait ainsi être inaudible, pour en déduire que cette simplification excessive, qui ne permettait pas de retrouver la richesse et la texture de la musique originelle, transformait l’œuvre et la banalisait et n’était pas une simple reproduction fragmentée des œuvres pour lesquelles les autorisations de la SACEM et de la société Editions Raoul Breton étaient suffisantes, la cour d’appel en a justement déduit que cet arrangement musical particulier portait atteinte au droit moral de l’auteur et requérait son autorisation ou celle de son ayant droit ».

C’est par cet attendu explicite que la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt rendu le 3 décembre 2021 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 2) qui avait considéré que la fabrication et la commercialisation de boîtes à musique à manivelle incorporant les œuvres musicales « Je Chante », « Y a d’la Joie », « Douce France » et « La Mer », sont constitutives d’une atteinte au droit moral de l’auteur, l’atteinte résultant en l’espèce de la simplification excessive de l’œuvre qui la transformait et la banalisait.

En d’autres termes, la reproduction d’une œuvre, outre qu’elle est susceptible de violer les droits patrimoniaux de l’auteur si elle est réalisée sans l’autorisation du titulaire des droits sur l’œuvre encore protégée, est également susceptible de porter atteinte au droit moral de l’auteur selon les modifications qui en résultent. Rien de nouveau, sinon l’occasion de rappeler que les prérogatives morales et patrimoniales ne sont pas toujours indépendantes l’une de l’autre.

  1. DROIT MORAL & CHANSONS : Le texte et la musique d’une chanson relèvent de genres différents et sont dissociables, en sorte que le seul fait que le texte ait été séparé de la musique ne porte pas nécessairement atteinte au droit moral de l’auteur (Cour de cassation, 1ère, 8 février 2023, n°21-23.976)

Cette décision de la Cour de cassation n’est pas révolutionnaire , mais met opportunément fin à une divergence entre la Cour d’appel de Versailles, qui avait jugé, il y a quelques années, que le texte et la musique d’une chanson n’étaient pas dissociables, en sorte que la publication du seul texte portait atteinte au droit moral de l’auteur (Versailles, 1ère Chambre, 19 novembre 2019, RG n°18/08181) et la Cour d’appel de Paris, qui a jugé le contraire dans une décision du 12 janvier 2021 (Pôle 5, chambre 1, décision qui faisait l’objet du pourvoi ayant donné lieu à l’arrêt rapporté), dans les deux cas à propos de chansons de Jean Ferrat.

La Haute juridiction approuve la solution de la Cour d’appel de Paris, et admet donc que les paroles d’une chanson puissent être publiées sans la musique, par exemple dans un ouvrage consacré à l’auteur compositeur (ce qui était le cas dans les deux litiges évoqués), ou au sein d’un recueil de paroles, sans que cette dissociation constitue, en soi, une atteinte au droit moral. Cette solution, de bon sens, mérite d’être approuvée.

Il reste que le contexte et les modalités de la publication des paroles ne doivent pas, eux, être de nature à porter atteinte au droit moral. En l’espèce, la Cour de cassation approuve également la Cour d’appel d’avoir admis l’exception de courte citation (qui constitue une exception au droits patrimoniaux, mais aussi, implicitement, au droit moral), dès lors que l’éditeur de l’ouvrage reproduisant des extraits des paroles de Jean Ferrat avait justifié de ce que chaque citation, qui « ne s’inscrivait pas dans une démarche commerciale ou publicitaire », était « nécessaire à l’analyse critique » de la chanson.

  1. AUDIOVISUEL & ACCORDS INTERPROFESSIONNELS :Deux accords interprofessionnels viennent récemment de consacrer des rémunérations minimales au profit des auteurs d’œuvres audiovisuelles (Arrêté du 22 février 2023 portant extension de l’accord du 23 janvier 2023 entre auteurs et producteurs d’œuvres audiovisuelles documentaires relatif à la rémunération minimale globale du dossier de présentation de projets documentaires de 52 minutes et plus ; Accord interprofessionnel sur les pratiques contractuelles entre auteurs-scénaristes et producteurs de fiction)

Un arrêté en date du 22 février 2023 a procédé à l’extension de l’accord interprofessionnel relatif à la rémunération minimale globale pour l’écriture de dossiers de présentation d’œuvres audiovisuelles documentaires. À l’occasion d’une précédente brève, nous avions fait état de cet accord signé le 23 janvier dernier entre les organisations professionnelles des auteurs (la GARRD, la Boucle Documentaire et la SCAM) et des producteurs (le SATEV, le SPECT, le SPI et l’USPA) qui, pour mémoire, a instauré le principe d’une rémunération minimale de 2.000 € bruts.

Dans la lignée de cet accord, pris sous l’égide de l’ordonnance du 12 mai 2021, transposant en droit français la directive du 17 avril 2019, un nouvel accord interprofessionnel est venu consacrer le principe d’une rémunération minimale au profit des auteurs. Le 22 mars 2023, à l’occasion du festival Séries Mania Forum à Lille, un accord relatif aux pratiques contractuelles entre auteurs-scénaristes et producteurs de fiction a ainsi été signé par quatre organisations professionnelles (la Guilde française des scénaristes, la SACD, le SPI et l’USPA) afin, notamment, d’instaurer une rémunération minimale des scénaristes de fiction au titre des travaux d’écriture.

À compter de sa date d’entrée en vigueur, prévue le 1er juillet 2023, cet accord a  vocation à s’appliquer à tous les contrats de droit français conclus entre auteurs-scénaristes et producteurs délégués en vue de la production d’œuvres de fiction en prises de vue réelles non destinées à une première exploitation cinématographique, à l’exclusion notamment des fictions quotidiennes feuilletonnantes, des œuvres de fiction interactives ou immersives et des œuvres de fiction exclusivement destinées aux réseaux sociaux.

Avec cet accord, les organisations professionnelles se sont entendues sur :

  • L’instauration d’un lexique définissant les différentes étapes d’écriture (fil à fil, traitement, séquencier, etc.), avec un encadrement du nombre de pages, de versions successives et d’échanges correctifs entre scénaristes et producteurs, ainsi qu’une définition modernisée de la bible de série originale ;
  • L’apparition au sein de ce lexique du concept d’atelier d’écriture structuré (ADES) – un cadre d’écriture collaboratif provenant des usages anglo-saxons ;
  • La mise en place d’une enveloppe minimale d’écriture (EME) garantissant qu’une proportion minimale de dépenses en droits d’auteurs sera affectée à la rémunération des travaux d’écriture de l’œuvre concernée ;
  • La consécration d’une disposition en matière d’échéancier de paiement aux termes de laquelle, dans le cadre d’un contrat de commande de texte et de cession de droits (hors ADES), au moins 70% de la rémunération totale de l’auteur lui sera versée au titre des étapes d’écriture successives ;
  • L’instauration d’un prix plancher pour l’écriture de la bible (6.000 € bruts dans tous les cas ; cette base minimale étant portée à 11.000 € bruts en présence d’une convention de développement signée avec un éditeur de services) ;
  • Le caractère obligatoire d’un mécanisme automatique de rémunération complémentaire après amortissement du coût de l’œuvre afin de mieux associer les scénaristes au succès des œuvres, notamment à l’international.
  1. SPECTACLES & VENTE DE BILLETS SANS AUTORISATION : Tout comme la vente de billets, la fourniture de moyens en vue de la vente de billets sans autorisation du producteur de spectacles est interdite. Google vient d’en faire récemment les frais (Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 1, 29 mars 2023, n° 21/00704)

Google a été condamné par un arrêt du 20 mars 2023 de la Cour de d’appel de Paris à verser au Prodiss, le Syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété, la somme de 300 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices portés à l’intérêt collectif de la profession, ainsi que la coquette somme de 60 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La condamnation a été prononcée sur le fondement traditionnel de la responsabilité civile (article 1240 du code civil) et de l’article 313-6-2 du code pénal qui interdit tant la vente ou l’offre de vente de billets que la « fourniture les moyens en vue de la vente ou de la cession des titres d’accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, de manière habituelle et sans l’autorisation du producteur, de l’organisateur ou du propriétaire des droits d’exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle ».

En cause le service Google Ads qui a fourni les moyens de la réalisation de vente de billets sans l’autorisation des titulaires des droits. Dans sa décision, la Cour rappelle que « Google Ads est un service de régie publicitaire offrant aux annonceurs la possibilité d’afficher des annonces sur le site du moteur de recherche Google.fr en fonction de mots-clés saisis par les internautes, un système d’enchères déterminant, sur la base des mots-clés choisis par l’annonceur, l’apparition de liens promotionnels dirigeant l’internaute vers le site de l’annonceur, la société Google Ireland, qui exploite le moteur de recherche Google.fr et qui met à disposition ce service Google Ads, étant rémunérée à chaque clic sur le lien promotionnel ». Or il a été établi que sur le site Google.fr ont été diffusées des annonces publicitaires en vue de la vente sur les sites Viagogo.fr, ticketstarter.fr, onlineticketshop.com, ticketbis.fr, stubhub.fr et rocket- ticket.com des billets des spectacles des artistes Artic Monkeys, Paul McCartney, Slash, Rammstein, Grand corps malade, Mylene Farmer, Drake et Metallica, sans autorisation des producteurs de ces spectacles.

Les condamnations prononcées sont lourdes, plus lourdes qu’en première instance (40 000 euros au titre des dommages intérêts ; 20 000 euros au titre des frais de justice : TJ Paris, 15 octobre 2020) ; elles l’ont été sans que la Cour d’appel considère nécessaire de faire droit à l’injonction de production de pièces sollicitée par le Prodiss.

  1. L’AVOCAT MANDATAIRE SPORTIF & L’AGENT : L’avocat mandataire sportif ne saurait mettre en relation en joueur et un club, intéressés à la conclusion d’un contrat relatif à l’exercice rémunéré d’une activité sportive ; il ne peut être rémunéré que par son client (Cour de cassation, 1e, 29 mars 2023, n° 21-25.335)

Par une délibération du 2 juin 2020 le conseil de l’ordre des avocats au Barreau de Paris avait souhaité modifier le règlement intérieur du barreau de Paris afin d’autoriser l’avocat mandataire sportif, d’une part, à mettre en relation un sportif et un club et, d’autre part, à permettre au premier de donner mandat au second de verser à l’avocat, en son nom et pour son compte, les honoraires correspondant à sa mission.

La délibération a fait long feu.

Elle a d’abord été retoquée par Cour d’appel de Paris par un arrêt du 14 octobre 2021 avant que la Cour de cassation ne siffle la fin du jeu. Par un arrêt du 29 mars 2023, la Cour de cassation a en effet considéré que « l’avocat ne peut, tant à titre principal qu’à titre accessoire, exercer l’activité d’agent sportif et que l’avocat agissant en qualité de mandataire de l’une des parties intéressées à la conclusion d’un tel contrat ne peut être rémunéré que par son client ». L’avocat a pour mission de représenter les intérêts de son client, il ne peut mettre en rapport les parties intéressées à la conclusion d’un contrat relatif à l’exercice rémunéré d’une activité sportive, ainsi que l’avait énoncé la Cour d’appel de Paris, sauf à prendre le risque d’un conflit d’intérêts.

La décision de la Cour de cassation a été brièvement commentée par notre associé Rhadamès Killy. La vidéo est accessible sur notre site internet.

  1. DONNÉES PERSONNELLES & TRANSFERT VERS LES ÉTATS-UNIS : Dans un avis rendu le 28 février 2023, le Comité Européen à la Protection des Données (« CEPD »), prend acte des améliorations à la protection des données personnelles des citoyens européens résultant du nouveau cadre juridique adopté par le Président Joe Biden le 7 octobre 2022, mais dresse aussi la liste des sujets d’inquiétude qui persistent (CEPD, avis 5/2023 du 28 février 2023 sur le projet de décision d’adéquation relatif au cadre des transferts de données personnelles entre l’UE et les Etats-Unis).

On se souvient qu’à la suite de l’annulation du Privacy Shield, qui régissait le transfert de données personnelles entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, par la Cour de Justice, le 16 juillet 2020 (qui faisait elle-même suite à l’invalidation du Safe Harbor par la même Cour le 6 octobre 2015), en raison notamment de la faculté persistante, pour les services secrets américains, d’accéder massivement aux données personnelles des citoyens européens, le Président Joe Biden a adopté le 7 octobre 2022 un nouveau cadre juridique à de tels transferts, sous la forme d’un Executive order.

La Commission européenne a publié, en date du 13 décembre 2022, un projet de décision d’adéquation de cet acte législatif américain au droit européen, considérant donc que cet acte offrait des garanties suffisantes aux transfert de données personnelles des citoyens européens vers les Etats-Unis.

Néanmoins, avant d’adopter cette décision, la Commission a sollicité l’avis du CEPD, lequel est mitigé.

Si le CEPD, dont l’avis est consultatif, accueille favorablement l’introduction d’une exigence de nécessité et de proportionnalité dans le traitement des données personnelles par les agences américaines de renseignement, il dresse aussi une liste de points d’inquiétude, parmi lesquels l’exercice de certains droits des personnes une fois le transfert effectué, l’étendue des exceptions aux règles énoncées, la faculté temporaire de procéder à la collection de données « en vrac », et le fonctionnement effectif du mécanisme de recours.

In fine, le CEPD recommande à la Commission de subordonner sa décision d’adéquation à l’adoption, par l’ensemble des agences de renseignements américaines, de politiques et de procédures de mise en œuvre de l’Executive order préalablement évaluées et contrôlées par elle. A suivre, donc.

  1. ENCADREMENT DES INFLUENCEURS SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX : Jeudi 30 mars, l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (Proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux).

Les influenceurs sur internet sont devenus les nouveaux prescripteurs de notre monde numérisé. Ils seraient devenus si incontournables qu’ils menaceraient l’ordre public économique. C’est au nom de cet impératif que le Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté́ industrielle et numérique a souhaité que l’influence commerciale sur internet soit régulée. L’Assemblée nationale a été à l’unisson : une proposition de loi a été présentée et adoptée en première lecture et à l’unanimité le 30 mars 2023.

En adoptant la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, l’Assemblée nationale a ainsi ouvert la voie à une première régulation du « marketing d’influence » en France.

En substance, le texte règlemente l’activité d’influenceur commercial sur internet et les relations existant entre l’influenceur et son agent d’une part, ainsi qu’avec l’annonceur d’autre part ; il comporte enfin certaines mesures spécifiques relatives aux sites d’hébergement de contenus et autres plateformes en ligne ou encore s’agissant du jeune public.

La proposition de loi pose d’abord les bases d’un statut de l’influenceur commercial. Ce dernier est ainsi défini : « Les personnes physiques ou morales qui mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public par voie électronique des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique ».

Le texte rappelle que « les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’encadrement de la promotion des biens et des services ainsi que celles en matière de publicité sont applicables à l’activité d’influence commerciale par voie électronique définie à l’article 1er ». Il interdit encore plus spécifiquement toute promotion, directe ou indirecte, portant atteinte à la protection de la santé publique des actes, procédés, techniques et méthodes à visée esthétique. Il prohibe également la promotion de certains produits et services financiers (y compris crypto actifs) et celle de « produits illicites et contrefaisants », cette dernière interdiction étant toutefois curieusement limitée à la seule contrefaçon de marque, le droit d’auteur ou le droit des brevets n’étant pas visés expressément. Le non-respect de ces interdictions est pénalement sanctionné. Le texte règlemente également les communications par voie électronique relatives aux jeux d’argent et de hasard.

Outre ces interdictions, le texte pose des obligations d’informations à la charge des influenceurs afin d’identifier les promotions qu’ils réalisent de façon « claire, lisible et identifiable sur l’image ou la vidéo, sous tous les formats, durant l’intégralité de la promotion ». Selon le contenu du message, d’autres obligations doivent encore être respectées. Là encore le non-respect de ces différentes obligations d’information est pénalement sanctionné.

La proposition de loi concerne également l’activité d’agent influenceur. Le texte en donne une définition : « L’activité d’agent d’influenceur consiste à représenter ou à mettre en relation, à titre onéreux, les personnes physiques ou morales exerçant l’activité définie à l’article 1er avec des personnes physiques ou morales sollicitant leur service, dans le but de promouvoir des biens, des services, des pratiques ou une cause quelconque ». L’agent devra être vigilant puisqu’il est précisé qu’il doit « prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la défense des intérêts des personnes exerçant l’activité d’influence commerciale par voie électronique qu’ils représentent et pour éviter les situations de conflit d’intérêts ou d’atteinte au droit de la propriété intellectuelle ».

Le texte précise encore que les contrats conclus par l’influenceur tant avec son agent qu’avec les annonceurs doivent être conclus par écrit et qu’ils doivent comporter certaines mentions obligatoires (dont notamment la rémunération, en numéraire ou en nature), et ce à peine de nullité.

Le texte va plus loin et impose « la soumission du contrat au droit français, lorsque ledit contrat a pour objet ou pour effet de mettre en œuvre une activité d’influence commerciale par voie électronique visant principalement un public établi sur le territoire français ». Et lorsque l’influenceur est établi hors de l’Union européenne (Suisse et Espace économique européen compris), mais que son activité vise « même accessoirement, un public établi sur le territoire français », il doit alors « souscrire, auprès d’un assureur établi dans l’Union européenne, une assurance civile garantissant les conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile professionnelle ».

La proposition de loi soumet enfin l’activité des influenceurs aux règles applicables aux fournisseurs d’hébergement de contenus et autres plateformes en ligne auxquels il est fait obligation notamment de mettre en place les mécanismes permettant de signaler tout contenu illicite et de prendre les mesures nécessaires à la suppression desdits contenus illicites.

Des mesures spécifiques ont enfin été apportées s’agissant du jeune public, qu’il s’agisse de l’influenceur de moins de 16 ans qui ne peut faire la promotion de certains produits (boissons et produits alimentaires riches en sucre, en sel, en édulcorants de synthèse ou en matières grasses), de l’utilisation de l’image d’enfants sur les plateformes en ligne, ou encore d’actions de sensibilisation du jeune public face aux contenus.

Le texte doit désormais être examiné par le Sénat. Avant même son adoption définitive, un « Guide de bonne conduite : influenceurs et créateurs de contenu » a été publié sous l’égide du Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté́ industrielle et numérique.

 

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Condamnation d’OVH – incendie, risque de propagation après la décision du Tribunal de commerce de Lille du 26 janvier 2023 ?

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Pour lire la décision dans son intégralité, c’est ici !

 

Par décision du 26 janvier 2023, le tribunal de commerce de Lille Métropole a condamné la société OVH qui assure notamment des prestations d’hébergement de sites internet à indemniser l’un de ses clients, la société France Bati Courtage, du préjudice subi consécutivement à l’incendie qui s’est déclaré dans la nuit du 9 au 10 mars 2021 dans ses datacenters situés à Strasbourg et ayant entrainé la perte des données de sauvegarde qu’elle s’était contractuellement engagée à préserver.

La société OVH a ainsi été condamnée à verser à son (ancien ?) client la somme de 100 000 euros environ tous préjudices confondus, article 700 du Code de procédure civile compris.

La décision est intéressante à plus d’un titre.

La décision est intéressante car elle retient la responsabilité contractuelle d’OVH « du fait de son manquement contractuel à la réalisation des sauvegardes de son serveur ». Si la responsabilité d’OVH est en l’espèce retenue, c’est parce que le contrat portait non pas seulement sur des services d’hébergement, mais aussi et surtout sur la sauvegarde automatique des données, présentée par OVH comme « une opération qui consiste à dupliquer et à mettre en sécurité les données contenues dans un système informatique ». Or, en l’espèce, ces données de sauvegarde avaient été détruites et perdues à cause de l’incendie « car ces dernières étaient stockées au même endroit que le serveur principal » et que l’analyse de la documentation contractuelle et commerciale d’OVH, selon le Tribunal, ne laissait guère de doute sur le fait que les sauvegardes de données devaient se faire dans un espace de stockage physiquement isolé du serveur principal. Le Tribunal retient ainsi « qu’en stockant les 3 réplications de sauvegardes au même endroit que le serveur principal, OVH n’a pas respecté ses obligations contractuelles ».

Si la responsabilité d’OVH est ainsi retenue, la faute lourde a néanmoins été écartée. Pour ce faire, le Tribunal ne se place par sur le choix d’OVH de regrouper sur un même site le serveur principal et ceux destinés à conserver les données de sauvegarde, mais sur les choix techniques de ses installations. Le Tribunal observe à cet égard qu’il n’est pas démontré que ces choix ont « un lien de causalité avec l’incendie » ou qu’ils enfreignent « la loi ou règlementation », mais que bien au contraire les pièces versées au débat par OVH « montrent que cette dernière a pris les mesures de précaution d’usage contre l’incendie ». La conclusion est étonnante car le Tribunal observe dans le même temps que « à ce jour, l’enquête est toujours en cours et les causes exactes de l’incendie ne sont pas connues ».

La décision est également intéressante s’agissant de la validité des clauses limitatives de responsabilité insérée, en particulier, dans un contrat d’adhésion. Car dans un tel contrat, « toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite » (art. 1171 code civil). Or en l’espèce, la clause pré-rédigée par OVH conduisait in fine à limiter sa responsabilité à la somme de 1800, 48 euros. Le Tribunal écarte ainsi la clause limitative de responsabilité au motif que celle-ci crée « une véritable asymétrie entre les obligations de chacun (….), cette clause transférant le risque sur l’autre partie de manière injustifiée et sans contrepartie pour cette dernière ».

La décision est intéressante aussi s’agissant de la force majeure. En l’occurrence, le contrat OVH étendait les cas de force majeure à des très nombreuses hypothèses, y compris « les incendies (…) les inondations et explosions, ainsi que les coupures d’électricité en dehors du contrôle de la Partie affectée ». Le Tribunal vient rappeler qu’avec « une telle clause, en cas de sinistre, la SAS OVH n’est donc jamais tenue de réaliser sa mission au moment où, pourtant, celle-ci est nécessaire. Les copies de sauvegarde n’ont pas d’intérêt en l’absence de sinistre (…). Les copies de sauvegarde ne sont utiles qu’en cas de sinistre ». En conséquence, le Tribunal de commerce déclare la clause non écrite en ce qu’elle vide le contrat de sa principale obligation et libère OVH «  de ses engagements dans les circonstances où justement ils sont nécessaires ».

La décision est intéressante enfin car elle intervient après deux autres décisions qui avaient écarté la responsabilité d’OVH (Tribunal de commerce de Lille, 21 juin 2022 et Tribunal de commerce de Villefranche, référé, 30 juin 2022). Le Tribunal prend soin de préciser à cet égard que ces affaires sont différentes sur un point essentiel : le contrat souscrit auprès d’OVH portait sur un contrat d’hébergement simple et non sur l’option de sauvegarde automatique proposée par OVH, alors que tel était précisément le cas dans l’affaire ici commentée.

Par la présente décision, le Tribunal de commerce ouvre grand la voie à des actions initiées par les clients d’OVH qui auraient souscrit à la fois un contrat d’hébergement, mais aussi, en complément, l’option de sauvegarde automatisée permettant la préservation et la récupération des données du serveur dédié et dont les données de sauvegarde auraient été détruites lors de l’incendie du mois de mars 2021.

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Lettre d’information Février 2023

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Pour consulter notre lettre d’information en format pdf téléchargeable , cliquer ici –>https://vpk-avocats.com/wp-content/uploads/2023/02/20230202_Lettre_Info_VPK_Fév_2023.pdf

Au sommaire :

1. ŒUVRES D’ART & PRESCRIPTION DE L’ACTION EN NULLITÉ : Selon la Cour d’appel de Paris, l’existence d’un doute avéré sur l’authenticité d’une œuvre suffit pour apprécier le point de départ du délai de prescription quinquennale applicable à l’action en nullité fondée sur l’erreur sur la substance (CA Paris, pôle 4, ch. 13, 10 janvier 2023, n°20-15.324).

2. INTERNET & COOKIES : Le Comité Européen de la Protection des Données (« CEPD ») a adopté le rapport de son comité de travail sur les bannières de cookies le 17 janvier 2023. Ce rapport indique la position des autorités participantes sur les différentes pratiques en matière de design de bannières, et propose un certain nombre de recommandations visant à assurer le consentement des utilisateurs (Rapport du CEPD « Cookie Banner Task Force », 17 janvier 2023).

3. DONNÉES PERSONNELLES & TRANSFERTS HORS UE : L’encadrement des transferts de données personnelles hors de l’Union européenne par des clauses contractuelles types doit, depuis le 27 décembre 2022, reposer sur le nouvel modèle de la Commission européenne, qui est toutefois insuffisant en matière de transferts vers les Etats-Unis (Décision d’exécution (UE) 2021/914 de la Commission européenne du 4 juin 2021 & Décret du 7 octobre 2022 signé par le président des Etats-Unis « Enhancing Safeguards for United States Signals Intelligence Activities »).

4. AUDIOVISUEL & RÉMUNÉRATION DES AUTEURS DE DOCUMENTAIRES : Les organisations professionnelles des auteurs et des producteurs ont signé le 23 janvier 2023 un accord encadrant la rémunération minimale des auteurs dans le cadre des projets documentaires (Accord interprofessionnel pour la rémunération minimale des auteurs de documentaire, 23 janvier 2023).

5. CONTREFACON DE MARQUE & PLATEFORMES : La Cour de Justice de l’Union européenne a rendu le 22 décembre 2022 un arrêt important en matière de contrefaçon de marque, concernant les plateformes de marché en ligne qui publient à la fois des annonces relatives à leurs propres produits, qu’elles commercialisent sous leur nom et pour leur compte, et des annonces émanant de vendeurs tiers (CJUE, 22 décembre 2022, Aff. C-148/21 et C-184/21, Louboutin c. Amazon).

6. SPORT & LUTTE CONTRE LE PIRATAGE : Les quatre principaux fournisseurs d’accès à internet et les titulaires de droits sportifs viennent de signer un accord visant à protéger les retransmissions sportives. Cet accord intervient près d’un an après l’entrée en vigueur de l’article L. 333-10 du Code du sport, dont l’application a permis le blocage de 1.299 sites diffusant illicitement des contenus sportifs en ligne (Communiqué de presse de l’ARCOM en date du 18 janvier 2023).

En savoir plus :

1. ŒUVRES D’ART & PRESCRIPTION DE L’ACTION EN NULLITÉ : Selon la Cour d’appel de Paris, l’existence d’un doute avéré sur l’authenticité d’une œuvre suffit pour apprécier le point de départ du délai de prescription quinquennale applicable à l’action en nullité fondée sur l’erreur sur la substance (CA Paris, pôle 4, ch. 13, 10 janvier 2023, n°20-15.324).

En matière d’art, il est constant que l’origine et l’authenticité d’une œuvre constituent des qualités substantielles déterminantes du consentement. En conséquence, la vente contractée par un acheteur dans la conviction erronée de l’authenticité de l’œuvre d’art acquise doit être déclarée nulle, l’erreur commise sur les qualités substantielles de la chose objet de la convention constituant un vice du consentement, sanctionné par la nullité de la vente en application des articles 1130 et suivants du code civil.

L’action en nullité de la vente pour erreur doit être exercée dans un délai de 5 ans, qui court à compter de la découverte de l’erreur, sans pour autant excéder un délai butoir de 20 ans, qui court à compter du jour de la conclusion de la vente (articles 2224 et 2232 du code civil).

Pour apprécier précisément le point de départ du premier délai de 5 ans, la question se pose toutefois de savoir si la notion de « découverte de l’erreur » suppose une certitude ou si un doute peut suffire.

C’est tout l’intérêt de l’arrêt rapporté, la Cour d’appel de Paris ayant considéré que « le doute avéré sur l’authenticité d’une œuvre d’art suffit à fonder une action en nullité de la vente de sorte que le délai de prescription commence à courir à compter de la connaissance par [l’acquéreur] de ce doute et non à compter de la certitude de l’inauthenticité … ».

2. INTERNET & COOKIES : Le Comité Européen de la Protection des Données (« CEPD ») a adopté le rapport de son comité de travail sur les bannières cookies le 17 janvier 2023. Ce rapport indique la position des autorités participantes sur les différentes pratiques en matière de design de bannières, et propose un certain nombre de recommandations visant à assurer le consentement des utilisateurs (Rapport du CEPD « Cookie Banner Task Force », 17 janvier 2023).

Les bannières cookies présentes sur les sites et applications mobiles ne sont pas toujours conformes à la règlementation destinée à protéger la vie privée des internautes.

Le rapport du comité de travail du CEPD sur le design et les caractéristiques des bannières cookies, adopté le 17 janvier 2023, donne des orientations sur les pratiques à suivre ou, au contraire, à proscrire.

Cinq points sont à retenir :

1. L’usage, en premier affichage, d’une bannière prévoyant des boutons d’acceptation des cookies et d’accès aux options de configuration sans prévoir un bouton permettant le rejet des cookies n’est pas conforme à la Directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002 dite « vie privée et communications électroniques » pour la majorité des autorités de protection des données européennes, car n’assurant pas le consentement valide de l’utilisateur ;

2. L’existence de choix « pré-cochés » dans le deuxième affichage des bannières concernant les cookies n’est pas non plus conforme à la règlementation, le consentement ainsi donné n’étant pas libre et éclairé ;

3. Concernant l’usage des couleurs et des contrastes dans le design des bannières, il est précisé qu’est considérée comme non conforme la pratique visant à rendre le texte illisible. Pour le reste, il est renvoyé à une appréciation au cas par cas ;

4. L’usage d’un lien en lieu et place d’un bouton de rejet est valide dès lors que les indications concernant le but de la bannière sont claires. En revanche, n’est pas valide le lien intégré au texte sans élément visuel ou le placement du lien en dehors de la bannière sans élément visuel de nature à attirer l’attention de l’utilisateur. ;

5. L’usage, au premier affichage, de la bannière indiquant la possibilité d’accepter la lecture et le placement de cookies sans référence à la possibilité de rejeter les cookies est, sans surprise, non valide. Le rapport souligne que l’utilisateur doit pouvoir distinguer l’acceptation des cookies de son accord aux traitements ultérieurs éventuels de ses données personnelles, soulignant que le manquement à l’obligation de recueillir le consentement des utilisateurs au sens de la Directive vie privée et communications électroniques entraine une absence de conformité au RGPD. De plus, la base légale de l’intérêt général n’a pas vocation à s’appliquer dans ces cas.

Ce rapport, bien que non contraignant, établit les bases européennes en matière de bannières cookies, qui seront ensuite appliquées par les autorités de protection des données. Ce rapport et la récente condamnation en France de Microsoft par la CNIL, à raison de l’affichage des bannières cookies non conformes, sont l’occasion de rappeler à tous les éditeurs de site internet la nécessité de prendre les mesures adéquates afin de s’assurer de la conformité de leurs pratiques en la matière.

3. DONNÉES PERSONNELLES & TRANSFERTS HORS UE : L’encadrement des transferts de données personnelles hors de l’Union européenne par des clauses contractuelles types doit, depuis le 27 décembre 2022, reposer sur le nouveau modèle de la Commission européenne, qui est toutefois insuffisant en matière de transferts vers les Etats-Unis (Décision d’exécution (UE) 2021/914 de la Commission européenne du 4 juin 2021 & Décret du 7 octobre 2022 signé par le président des Etats-Unis « Enhancing Safeguards for United States Signals Intelligence Activities »).

Pour mémoire, le transfert vers un pays hors de l’Union européenne de données à caractère personnel ne peut avoir lieu que dans les trois cas suivants : si le transfert est fondé sur une « décision d’adéquation » de la Commission européenne, si des « garanties appropriées » ont été prévues par les parties au transfert ou si l’une des dérogations prévues par le RGPD est applicable. Parmi les garanties qualifiées d’appropriées par le RGPD figure l’utilisation, dans les relations entre l’importateur et l’exportateur des données, des clauses contractuelles types de protection des données (« CCT ») adoptées par ladite Commission.

Or, depuis le 27 décembre 2022, les CCT qui avaient été adoptées, par décisions de la Commission n°2001/497/CE et n°2010/87/UE, ne sont plus réputées offrir des garanties appropriées. Seules peuvent désormais être utilisées, y compris dans les contrats en cours, les nouvelles CCT adoptées par la Commission dans sa décision n°2021/914 du 4 juin 2021.

Ces nouvelles CCT présentent plusieurs changements, dont le plus notable est l’application de la jurisprudence résultant de la décision dite « Schrems II » rendue par la CJUE le 16 juillet 2020 (aff. C-311-18). En effet, il est désormais prévu que l’exportateur et l’importateur de données sont tenus de vérifier que le droit du pays de destination des données ne remet pas en cause les garanties prévues dans les CCT et, lorsque c’est le cas, ils ont l’obligation de prévoir des mesures de protection supplémentaires à celles offertes dans ces clauses ou de renoncer au traitement de données.

En cas de transfert vers les Etats-Unis, l’utilisation des CCT doit, en l’état, être nécessairement accompagnée de ces mesures supplémentaires. Un décret visant à offrir des nouvelles garanties de protection des données personnelles a certes été signé par le président américain le 7 octobre 2022, mais une décision constatant que ces garanties assurent un niveau de protection adéquat doit encore être adoptée par la Commission européenne. Cette future décision d’adéquation sera susceptible de fonder tout transfert de données personnelles vers les Etats-Unis, mais sa validité risque fortement d’être contestée devant la CJUE, comme l’a déjà annoncé une organisation non gouvernementale.

4. AUDIOVISUEL & RÉMUNÉRATION DES AUTEURS DE DOCUMENTAIRES : Les organisations professionnelles des auteurs et des producteurs ont signé le 23 janvier 2023 un accord encadrant la rémunération minimale des auteurs dans le cadre des projets documentaires (Accord interprofessionnel pour la rémunération minimale des auteurs de documentaire, 23 janvier 2023).

Les organisations professionnelles des auteurs et des producteurs ont signé, le 23 janvier 2023, un accord portant sur la rémunération minimale au titre de l’écriture documentaire. Cet accord consacre le principe d’une rémunération minimale de 2 000 € bruts pour les auteurs et autrices des dossiers de présentation d’œuvres documentaires. Les parties se sont entendues sur un versement par étapes de la rémunération : 1 000 € sont définitivement acquis au bénéfice de l’auteur quel que soit le financement obtenu pour le projet de documentaire, auquel s’ajoute la somme complémentaire de 1 000 € « dès lors que le producteur cumule 6 000 € de financement dédié à l’œuvre quelle qu’en soit la provenance (aide CNC automatique ou non, préachat, Procirep, collectivités locales …) », selon les précisions figurant dans le communiqué de presse annonçant cet accord. .

Celui-ci s’inscrit dans la logique de la directive du 17 avril 2019, transposée en droit français par l’ordonnance du 12 mai 2021 et l’obligation en découlant d’une rémunération « appropriée et proportionnelle » (ou « proportionnée », dans la version anglaise de la directive…) pour les auteurs et les artistes-interprètes. Cet accord vient préciser les contours de cette nouvelle exigence, issue du droit de l’Union européenne, et partant devrait limiter les risques de contentieux – pour le documentaire du moins… – autour de ce concept flou applicable tous secteurs confondus.

5. CONTREFAÇON DE MARQUE & PLATEFORMES : La Cour de Justice de l’Union européenne a rendu le 22 décembre 2022 un arrêt important en matière de contrefaçon de marque par les plateformes de marché en ligne qui publient à la fois des annonces relatives à leurs propres produits, qu’elles commercialisent sous leur nom et pour leur compte, et des annonces émanant de vendeurs tiers (CJUE, 22 décembre 2022, Aff. C-148/21 et C-184/21, Louboutin c. Amazon).

Par arrêt du 22 décembre 2022, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) s’est positionnée sur la responsabilité des plateformes de ventes en ligne quant à l’usage contrefaisant d’une marque lorsque ces plateformes publient à la fois des annonces relatives à leurs propres produits et des annonces émanant de vendeurs tiers.

L’affaire opposait Amazon au créateur français des chaussures Louboutin, particulièrement connu pour la couleur rouge des semelles extérieures de ses chaussures à talon. En l’espèce, Christian Louboutin avait introduit plusieurs actions auprès des instances judiciaires du Luxembourg et de Belgique à l’encontre d’Amazon pour contrefaçon de marque. Le créateur soutenait notamment qu’Amazon faisait usage, sans son consentement, d’un signe identique à l’une de ses marques pour des produits identiques à ceux pour lesquels cette marque est enregistrée, du fait, notamment, de l’affichage, sur les sites Internet de vente en ligne de cette société, d’annonces relatives à des produits portant un tel signe identique, mais également du fait de la détention, de l’expédition et de la livraison de tels produits. Amazon contestait que l’usage d’un signe identique à la marque en cause puisse lui être imputé, soulignant à cet égard que les annonces litigieuses émanent de tiers ayant recours à sa plateforme, que l’inclusion de son logo dans les annonces des vendeurs tiers n’implique pas qu’elle s’approprie ces annonces et que les services accessoires qu’elle propose aux vendeurs tiers ne sauraient permettre de justifier que leurs offres soient considérées comme faisant partie de sa propre communication commerciale.

L’arrêt, joignant les deux renvois préjudiciels des juridictions belge et luxembourgeoise, se prononce sur la responsabilité des plateformes dans le cadre de la vente de produits contrefaisants de tiers, utilisateurs de ces dernières, au regard de l’article 9 du Règlement n°2017-1001 sur la marque de l’Union européenne.

Tout d’abord, la CJUE relève qu’il est nécessaire d’établir que la plateforme a « fait un usage » de la marque au sens de l’article 9 du Règlement précité. Elle précise à cet égard que « l’expression « faire usage » implique un comportement actif et une maîtrise, directe ou indirecte, de l’acte constituant l’usage » et que parmi les types d’usage actif que le titulaire de la marque peut interdire figure notamment « le fait d’offrir les produits contrefaisants, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins ». Elle rappelle également que l’usage d’un signe identique ou similaire à la marque du titulaire, fait par un tiers, est susceptible d’être sanctionné au titre du droit des marques, à la condition toutefois que celui-ci soit opéré dans le cadre de la communication commerciale de ce tiers. Elle estime encore que le seul fait de proposer des services complémentaires, comme le stockage ou la livraison, n’est pas de nature à constituer un usage effectif par la plateforme du signe litigieux.

Ceci rappelé, la CJUE précise qu’aux termes de sa jurisprudence antérieure, la Cour n’avait pas été « interrogée par rapport à l’incidence du fait que le site Internet de vente en ligne en question intègre, outre la place de marché en ligne, des offres à la vente de l’exploitant de ce site lui-même. Or, dans les présentes affaires, les juridictions de renvoi s’interrogent précisément sur cette incidence et l’importance à accorder, dans un tel contexte, à la perception des utilisateurs du site en question ainsi qu’à d’autres circonstances, telles que le fait que l’exploitant recourt à un mode de présentation uniforme des offres à la vente publiées sur son site Internet, affichant en même temps ses propres annonces et celles des vendeurs tiers et faisant apparaître son propre logo de distributeur renommé sur l’ensemble de ces annonces, ainsi que le fait qu’il offre des services supplémentaires à ces vendeurs tiers dans le cadre de la commercialisation de leurs produits, tels que le soutien dans la présentation de leurs annonces et le stockage et l’expédition de leurs produits ».

Prenant en cause cette spécificité, la CJUE pose que « l’exploitant d’un site Internet de vente en ligne intégrant, outre les propres offres à la vente de celui-ci, une place de marché en ligne est susceptible d’être considéré comme faisant lui-même usage d’un signe identique à une marque de l’Union européenne d’autrui pour des produits identiques à ceux pour lesquels cette marque est enregistrée, lorsque des vendeurs tiers proposent à la vente, sur cette place de marché, sans le consentement du titulaire de ladite marque, de tels produits revêtus de ce signe, si un utilisateur normalement informé et raisonnablement attentif de ce site établit un lien entre les services de cet exploitant et le signe en question, ce qui est notamment le cas lorsque, compte tenu de l’ensemble des éléments caractérisant la situation en cause, un tel utilisateur pourrait avoir l’impression que c’est ledit exploitant qui commercialise lui-même, en son nom et pour son propre compte, les produits revêtus dudit signe. Sont pertinents à cet égard les faits que cet exploitant recourt à un mode de présentation uniforme des offres publiées sur son site Internet, affichant en même temps les annonces relatives aux produits qu’il vend en son nom et pour son propre compte et celles relatives à des produits proposés par des vendeurs tiers sur ladite place de marché, qu’il fait apparaître son propre logo de distributeur renommé sur l’ensemble de ces annonces et qu’il offre aux vendeurs tiers, dans le cadre de la commercialisation des produits revêtus du signe en cause, des services complémentaires consistant notamment dans le stockage et l’expédition de ces produits ».

Dans le cas d’Amazon, la plateforme intègre sur une même place de marché en ligne et sous un mode de présentation uniforme à la fois les offres publiées pour son compte et celles publiées par des vendeurs tiers, et fait apparaitre son logo de distributeur sur l’ensemble des annonces. De plus, elle associe les produits, sans distinction de leur origine, à des promotions et/ou des offres, renforçant l’impression que l’ensemble des produits promus l’est par elle-même, en son nom et pour son compte, et créant alors une association entre les services et l’usage du signe pour l’utilisateur. Ces éléments sont de nature à conduire à la responsabilité de la plateforme pour contrefaçon, au titre de l’usage, en lien avec des produits vendus par des tiers sur sa place de marché en ligne, d’un signe constituant une marque, sans autorisation de son titulaire.

L’arrêt est donc favorable aux titulaires de marques, moins aux plateformes de vente en ligne qui ne se cantonnent pas strictement à un rôle d’intermédiaire ou qui ne distinguent pas clairement leur activité de celle de leurs clients.

5. SPORT & LUTTE CONTRE LE PIRATAGE : Les quatre principaux fournisseurs d’accès à internet et les titulaires de droits sportifs viennent de signer un accord visant à protéger les retransmissions sportives. Cet accord intervient près d’un an après l’entrée en vigueur de l’article L.333-10 du Code du sport, dont l’application a permis le blocage de 1.299 sites diffusant illicitement des contenus sportifs en ligne.

A l’occasion d’une précédente brève, nous avions fait état de la première décision rendue au visa de l’article L.333-10 du Code du sport, aux termes de laquelle la société beIN Sports France, titulaire des droits d’exploitation audiovisuelle de la Coupe d’Afrique des Nations, avait obtenu du Tribunal judiciaire de Paris qu’il enjoigne aux fournisseurs d’accès à internet le blocage de plusieurs sites retransmettant en direct la compétition et portant, de fait, des atteintes graves et répétées à ses droits exclusifs (Tribunal judiciaire, Paris, ord. réf., 20 janvier 2022, n°22/50416, Sté beIN Sports France c/SA Orange et a.)

Depuis cette décision, en application de l’article L. 333-10 précité, ce ne sont pas moins de 1.299 sites (en ce compris les sites miroirs) diffusant illicitement des contenus sportifs qui ont été bloqués. Sur le seul premier semestre 2022, l’audience sportive illicite globale a diminué de moitié (49%).

Reste qu’aux termes du paragraphe IV de l’article L.333-10 du Code du sport, l’ARCOM avait été chargée par le législateur d’élaborer des modèles d’accords à destination des fournisseurs d’accès à internet et des titulaires de droits, destinés notamment à préciser la répartition entre ces derniers du coût des mesures de blocage.

À cet égard, l’ARCOM vient d’annoncer la signature d’un accord entre les quatre principaux fournisseurs d’accès à internet et l’APPS (l’Association pour la Protection des Programmes Sportifs), représentant les principaux télédiffuseurs et organisateurs de compétitions sportives. Les acteurs du secteur se sont accordés sur la mise en place de bonnes pratiques en matière judiciaire mais également sur la prise en charge des coûts de l’automatisation des mesures de blocage notifiées par l’ARCOM sur saisine des ayants droit. Les modalités de cette prise en charge n’ont, pour l’heure, pas été rendues publiques.

L’ARCOM ainsi que la Fédération Française des Télécoms se sont félicitées de la conclusion de cet accord qui devrait permettre d’accélérer et de renforcer la lutte contre le piratage. Désormais, les deux instances appellent de leurs vœux la conclusion de nouveaux accords qui concerneraient cette fois les hébergeurs ou les moteurs de recherche.

A noter enfin, que cet accord intervient alors que la Commission européenne prévoit de publier le 26 avril prochain une recommandation intitulée « Lutte contre le piratage en ligne de contenus en direct ». Affaire à suivre donc…

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NFT et propriété intellectuelle, intervention de Xavier Près, colloque organisé par le CEIPI, 15 décembre 2022

 

PI & POP CULTURE, 4e saison

Colloque, Assemblée nationale, Palais Bourbon, 15 décembre 2022

Intervenants de l’épisode de 2 :

Xavier Près : “NFT et propriété intellectuelle : pop ou pas pop ?”

Jean-Marc Deltorn: “Métarvers, moteurs d’innovation ? Quelles questions de brevetabilité ”

Aurélie Guétin : “Regard du conseil en propriété industrielle sur le métavers”

Jean-Pierre Clavier : “Métavers et droit des marques”

Organisé par le CEIPI (Centre d’études internationales de la propriété intellectuelle), Université de Strasbourg, et la Ligue des auteurs professionnels

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Lettre d’information Décembre 2022

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Pour consulter notre lettre d’information en format pdf téléchargeable , cliquer ici –> Newsletter VARET PRES KILLY dec2022

Au sommaire :

  1. PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE & PRESCRIPTION : Par deux arrêts distincts, les Cours d’appel de Douai et de Paris viennent rappeler les règles applicables aux actions civiles en contrefaçon de droits d’auteur en matière de prescription, qui sont l’occasion de souligner les disparités existantes sur ce point entre les différents droits de propriété intellectuelle (CA Douai, 22 septembre 2022, n° 21/06332 et CA Paris, Pôle 5, ch. 1, 16 novembre 2022, n° 22/02862)
  2. DROIT D’AUTEUR & RÉMUNÉRATION APPROPRIÉE : Par un arrêt important en date du 15 novembre 2022, le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance 2021-580 du 12 mai 2021 portant transposition en droit français de certaines dispositions de la Directive 2019/790 du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique, et en particulier ses articles 18 et 20, en ce que cette ordonnance n’a pas transposé dans notre droit national l’exigence d’une rémunération appropriée au bénéfice des auteurs, édictée par l’article 18 de la directive (Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 15 novembre 2022)
  3. AUDIOVISUEL & REMAKE : Le film « Les Nouvelles aventures de Cendrillon » constitue un remake du film « Les nouvelles aventures d’Aladin » au sens du contrat de cession de droits d’auteur conclu entre le producteur audiovisuel et l’auteur-réalisateur, de sorte que l’exploitation du remake, bien que celui-ci ait été réalisé sans l’auteur-réalisateur de l’œuvre adaptée, ouvre droit au profit de ce dernier au paiement des redevances prévues au contrat en cas de « remake, sequel ou spin-off » (CA Paris, Pôle 5, ch. 2, 21 octobre 2022, n° 20/18408)
  4. MARQUE & USAGE SÉRIEUX : L’apposition sur des produits ou services d’un signe, déposé à titre de marque, ne vaut pas pour autant nécessairement usage à titre de marque spécialement lorsqu’il est reproduit à côté d’une autre marque (Cour de cassation, commerciale, 16 novembre 2022, n° 21-17.585)
  5. VARET-PRÈS-KILLY & NFT : Notre site internet propose une nouvelle fonctionnalité : des vidéos courtes sur une thématique juridique pour mieux comprendre en moins de 3 minutes les enjeux d’une question d’actualité. Les premiers épisodes sont consacrés aux NFTs (www.vpk-avocats.com, NFT : épisodes 1, 2 et 3)

 

 

En savoir plus :

  1. PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE & PRESCRIPTION : Par deux arrêts distincts, les Cours d’appel de Douai et de Paris viennent rappeler les règles applicables aux actions civiles en contrefaçon de droits d’auteur en matière de prescription, qui sont l’occasion -de souligner les disparités existantes sur ce point entre les différents droits de propriété intellectuelle (CA Douai, 22 septembre 2022, n° 21/06332 et CA Paris, Pôle 5, ch. 1, 16 novembre 2022, n° 22/02862)

Par l’arrêt du 22 septembre 2022, la Cour d’appel de Douai, en référé, a jugé que « la prescription des actions civiles en contrefaçon de droit d’auteur est soumise aux dispositions de l’article 2224 du code civil aux termes desquelles « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». Le délai de prescription commence donc à courir à partir de la commission de la contrefaçon ou du jour où le titulaire en a eu connaissance, même si la contrefaçon s’inscrit dans la durée ».

Exit donc l’argument selon lequel la contrefaçon est un délit continu (ou successif) de sorte que son point de départ pourrait être différé à la date de la cessation des actes contrefaisants, peu important la date à laquelle la victime en aurait eu connaissance.

La solution n’est pas nouvelle. Elle a été rappelée dans cette affaire opposant, en référé, l’auteur d’une sculpture monumentale de trois mètres de hauteur représentant trois chevaux dans une demi-vasque circulaire et l’exploitant du parc « Le potager des Princes » dans lequel une reproduction de la sculpture était exposée alors que la sculpture litigieuse avait été jugée contrefaisante par arrêt définitif de la cour d’appel de Paris du 17 décembre 2008. Elle a été réiétérée en des termes similaires quelques mois plus tard par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 16 novembre 2022 dans un litige opposant les auteurs d’une pièce musicale pour trompette et saxophone « Chajra » aux producteurs et exploitants de l’enregistrement « OMI – Cheerleader (Remix) », dont la spécificité portait sur l’application de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.

La solution est surtout l’occasion de rappeler les disparités existantes s’agissant du point de départ des actions civiles en contrefaçon de droits de propriété littéraire et artistique d’un côté et de droits de propriété industrielle de l’autre :

  • En droit d’auteur, les actions civiles en contrefaçon sont soumises à la prescription de droit commun, à savoir aux dispositions de l’article 2224 du code civil telles que rappelées ci-dessus fixant le point de départ « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer».
  • En revanche, depuis l’entrée en vigueur de la loi PACTE n°2019-486, le 24 mai 2019, les actions civiles en contrefaçon de marques (art. L. 716-4-2 CPI) de dessins et modèles (art. L. 521-3 CPI), de brevet (art. L. 615-8 CPI), et se prescrivent par cinq ans « à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l’exercer ». C’est donc « le dernier fait » qui fait courir le délai de prescription, de sorte que, à la différence du droit d’auteur, tant que la contrefaçon se poursuit, la prescription ne court pas.

Et l’on prendra garde à ne pas confondre ces délais avec ceux applicables aux actions pénales en contrefaçon (art. 8 du Code de procédure pénale : « L’action publique des délits se prescrit par six années révolues à compter du jour où l’infraction a été commise »). Ces disparités, au moins sur le plan civil, sont regrettables.

 

  1. DROIT D’AUTEUR & RÉMUNÉRATION APPROPRIÉE : Par un arrêt important en date du 15 novembre 2022, le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance 2021-580 du 12 mai 2021 portant transposition en droit français de certaines dispositions de la Directive 2019/790 du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique, et en particulier ses articles 18 et 20, en ce que cette ordonnance n’a pas transposé dans notre droit national l’exigence d’une rémunération appropriée au bénéfice des auteurs, édictée par l’article 18 de la directive (Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 15 novembre 2022)

Le Conseil d’Etat a été saisi d’un recours en annulation à l’encontre de plusieurs articles de l’ordonnance 2021-580 du 12 mai 2021 portant transposition en droit français de certaines dispositions de la Directive 2019/790 du 17 avril 2019, formé par le Comité pluridisciplinaire des artistes-auteurs et des artistes-autrices (CAAP) et par la Ligue des auteurs professionnels, ayant pour objet la défense des intérêts des auteurs dans le domaine des arts visuels pour le premier, et dans le domaine du livre pour le second.

Plusieurs des griefs soulevés à l’encontre de l’ordonnance ont été rejetés, qui ne seront pas commentés ici.

En revanche, l’ordonnance est annulée en ce qu’elle n’a pas transposé en droit interne l’obligation, imposée par l’article 18 de la directive, de prévoir une rémunération au profit des auteurs qui soit non seulement proportionnelle, mais aussi appropriée.

En effet, relève le Conseil d’Etat, l’article 4 de l’ordonnance a modifié, à juste titre, l’article L.131-5 du code de la propriété intellectuelle (qui régissait, pour mémoire, la faculté pour un auteur d’obtenir la révision de la rémunération forfaitaire qui lui avait été initialement attribuée lorsque cette rémunération apparaît lésionnaire), pour y introduire également la faculté pour l’auteur d’obtenir une rémunération complémentaire lorsque c’est la rémunération proportionnelle stipulée au contrat qui « se révèle exagérément faible par rapport à l’ensemble des revenus ultérieurement tirés de l’exploitation par le cessionnaire », conformément à l’exigence posée l’article 20 de la directive.

Mais, poursuit le Conseil d’Etat, l’ordonnance n’a en revanche pas modifié l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle, qui édicte, on le sait, le principe selon lequel la rémunération de l’auteur doit être proportionnelle aux recettes d’exploitation de son œuvre, ainsi que les cas dans lesquels où, par exception à ce principe, cette rémunération peut être forfaitaire.

Or, ce faisant, ou plutôt en ne faisant pas, l’ordonnance laisse subsister une discordance avec l’article 18 de la directive 2019/790, lequel pose en principe, on l’a dit, que la rémunération due aux auteurs par l’exploitant doit non seulement être proportionnelle aux recettes d’exploitation, mais aussi « appropriée ».

De prime abord, l’erreur paraît facile à corriger. Il suffira au législateur (le pouvoir donné au Gouvernement de transposer la directive par voie d’ordonnance a expiré, sauf nouvelle loi d’habilitation) d’insérer à l’article L.131-4 du code de la propriété intellectuelle, l’adjectif « appropriée », aux substantifs « participation » et « rémunération » employés dans ce texte.

En pratique, cette modification ouvre la faculté, pour les auteurs, de contester la rémunération contractuelle stipulée au motif qu’elle n’opérerait pas un partage équitable de la valeur entre eux et leur cocontractant, sans avoir à démontrer une lésion. Certes, il faudra justifier du caractère insuffisant de la rémunération sur la base d’éléments concrets, mais il est clair que cette évolution, voulue par la directive, donnera au juge, in fine, un pouvoir d’appréciation élargi des modalités de rémunération contractuellement convenues.

Et ce pouvoir peut être sollicité sans attendre de loi « corrective », puisque le délai de transposition étant expiré, la directive est directement invocable par les plaideurs.

  1. aussi pour rappel : « Directives 2019/790 et 2019/789 sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique, commentaire article par article », ouvrage sous la direction de Nicolas Binctin et Xavier Près, Bruylant, janvier 2021.
  1. AUDIOVISUEL & REMAKE : Le film « Les Nouvelles aventures de Cendrillon » constitue un remake du film « Les nouvelles aventures d’Aladin » au sens du contrat de cession de droits d’auteur conclu entre le producteur audiovisuel et l’auteur-réalisateur, de sorte que l’exploitation du remake, bien que celui-ci ait été réalisé sans l’auteur-réalisateur de l’œuvre adaptée, ouvre droit au profit de ce dernier au paiement des redevances prévues au contrat en cas de « remake, sequel ou spin-off » (CA Paris, Pôle 5, ch. 2, 21 octobre 2022, n° 20/18408)

« Les Nouvelles Aventures d’Aladin » est le titre d’un film sorti en salles le 14 octobre 2015 et produit par les sociétés 74 Films et Pathé Films. Les mêmes producteurs ont ensuite produit deux nouveaux films : « Les Nouvelles Aventures de Cendrillon » sorti en salles en 2017 et « Alad’2 » sorti en 2018. N’ayant pas été informé et encore moins sollicité pour réaliser les deux opus postérieurs, qu’il considère être des adaptations de son premier film, l’auteur réalisateur a mis en demeure son cocontractant. Ce dernier lui a répondu que « Les Nouvelles aventures de Cendrillon » n’était pas un remake du premier film qu’il avait réalisé et ne comportait aucun emprunt à cette première œuvre, à la différence du film « Alad’2 » pour lequel il serait par conséquent rémunéré conformément à son contrat d’auteur réalisateur stipulant à son profit une rémunération en contrepartie de la cession de ses droits de « remake, sequel ou spin-off ». Insatisfait en partie de cette réponse, le réalisateur a estimé qu’en l’absence de versement de la rémunération complémentaire contractuellement prévue au titre de l’exploitation du remake « Les Nouvelles aventures de Cendrillon » le producteur audiovisuel avait commis une faute contractuelle, ainsi que des actes de contrefaçon et des actes de parasitisme.

Par décision du 21 octobre 2022, la Cour d’appel de Paris a infirmé la décision des premiers juges, qui avaient débouté l’auteur-réalisateur de l’intégralité de ses demandes. Après avoir constaté que l’appelant ne reprenait plus en cause d’appel ses demandes relatives au parasitisme, elle a considéré, à la différence des premiers juges, que « nonobstant une histoire racontée de manière différente liée au conte dont le film est inspiré, la cour constate que le film ‘Les Nouvelles Aventures de Cendrillon’ doit être qualifié de « remake » au sens de l’article 2 III 3 du contrat conclu le 2 juin 2014 » entre le réalisateur et l’un de deux producteurs. Et après avoir constaté que l’auteur-réalisateur de l’œuvre première n’avait pas été rémunéré en contrepartie de l’exploitation du remake malgré les stipulations contractuelles fixées en ce sens, la Cour d’appel a condamné le producteur audiovisuel à verser à l’auteur la rémunération contractuellement prévue en ce cas. Les condamnations sont intervenues sur le seul fondement de l’inexécution contractuelle, la contrefaçon ayant été écartée par la Cour.

L’arrêt est intéressant car la notion de remake ne fait l’objet d’aucune définition légale ; elle est, en conséquence, abandonnée, dans le silence de la loi, à la pratique. Et la motivation de l’arrêt montre l’importance des définitions contractuelles, celles-ci se substituant aux définitions en usage. La Cour précise à cet égard que la qualification de remake ne suppose pas nécessairement l’existence d’une œuvre seconde qui « reprend l’histoire et l’intrigue du premier film » dès lors que ces éléments ne ressortent pas exclusivement de la définition contractuelle.

L’arrêt est encore intéressant car la Cour d’appel de Paris, pour entrer en voie de condamnation, écarte la qualification de contrefaçon au profit d’une responsabilité contractuelle résultant de l’inexécution du paiement des sommes stipulées au contrat. L’arrêt vient ainsi souligner que la qualification de contrefaçon ne saurait être appliquée systématiquement à toute violation d’un contrat ayant pour objet des droits de propriété intellectuelle, ainsi que pourrait le laisser penser une lecture trop rapide de l’arrêt de la Cour de cassation du 5 octobre 2022 (1e civ. 5 octobre 2022, pourvoi n° 21-15.386). Des incertitudes demeurent. Parmi celles-ci, la question reste ainsi ouverte de savoir si le non-paiement de redevances de droits d’auteur prévues à un contrat de cession de droits constitue une violation contractuelle ou si, bien que ne constituant pas directement une violation de l’autorisation d’exploitation, il n’en constitue pas moins une violation de l’une de ses modalités, et ce au même titre que le territoire, la durée, la destination et l’étendue des droits cédés et, partant, du droit lui-même…

Pour une analyse plus détaillée : « Cendrillon, la nouvelle aventure illicite d’Aladin. Chronique judiciaire d’un remake », à paraitre, Légipresse, décembre 2022, par Xavier Près.

  

  1. MARQUE & USAGE SÉRIEUX : L’apposition sur des produits ou services d’un signe, déposé à titre de marque, ne vaut pas pour autant nécessairement usage à titre de marque spécialement lorsqu’il est reproduit à côté d’une autre marque (Cour de cassation, commerciale, 16 novembre 2022, n° 21-17.585)

Par arrêt du 16 novembre 2022, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la Cour d’appel de Versailles, dans un litige opposant le titulaire de la marque française postérieure LE COMPTOIR DE L’APÉRITIF au titulaire de la marque antérieure française portant sur le même signe pour des produits et services identiques ou similaires, le premier sollicitant la déchéance de la marque antérieure pour défaut d’usage sérieux pendant une période ininterrompue de 5 ans.

La cassation intervient au visa de l’article L. 714-5 du code de la propriété intellectuelle (« CPI »), dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019. La Cour de cassation observe à cet égard que « pour retenir l’usage sérieux de la marque « comptoir de l’apéritif », l’arrêt, après avoir constaté que la société Scan import indiquait avoir proposé des produits tartinables pour l’apéritif vendus sous la marque « Cruscana » et une nouvelle gamme « comptoir de l’apéritif » puis écarté des photographies, non datées, de produits, de présentoirs et de rayonnages de grandes surfaces, retient qu’une vingtaine de factures émises par la société Scan import au cours des années 2011 à 2016 attestent de la vente de produits porteurs de la marque « comptoir de l’apéritif » auprès de grandes surfaces d’enseignes différentes, installées dans plusieurs départements. Il estime que si la majorité des références des produits comportent le signe « Cruscana » placé devant la mention « comptoir de l’apéritif », il n’en est pas moins établi que la société Scan import a utilisé la marque pour présenter et vendre des produits alimentaires désignés à son enregistrement. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l’exploitation du signe « comptoir de l’apéritif » à titre de marque auprès des consommateurs finals, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

La décision est classique ; elle est fondée sur le principe selon lequel la « marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, ce qui suppose l’utilisation de celle-ci sur le marché pour désigner les produits ou services protégés ».

L’arrêt n’en est pas moins intéressant sur un plan pratique : il permet de rappeler que l’apposition sur des produits ou services d’un signe, déposé à titre de marque, ne vaut pas pour autant nécessairement usage à titre de marque spécialement lorsqu’il est reproduit à côté d’une autre marque.

  1. VARET-PRÈS-KILLY & NFT : Notre site internet propose une nouvelle fonctionnalité : des vidéos courtes sur une thématique juridique pour mieux comprendre en moins de 3 minutes les enjeux d’une question d’actualité. Les premiers épisodes sont consacrés aux NFTs (www.vpk-avocats.com, NFT : épisodes 1, 2 et 3).

Notre société d’avocats fête ses deux ans.

A cette occasion, nous inaugurons sur notre site internet une nouvelle fonctionnalité : des vidéos courtes sur une thématique juridique pour mieux comprendre en moins de 3 minutes les enjeux d’une question d’actualité.

Les premières ont trait aux NFTs et se déclinent en 3 épisodes :

  • 1er épisode : qu’est-ce qu’un NFT ?
  • 2épisode : NFT et Crypto-art
  • 3e épisode : NFT, quelle monétisation ?

Les deux premiers épisodes sont déjà en ligne : https://vpk-avocats.com.

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Lettre d’information – Octobre 2022

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Au sommaire :

  1. MARQUE & NOM PATRONYMIQUE : Une marque antérieure ne saurait paralyser l’utilisation de bonne foi d’un nom patronymique (Cour de cassation, Com., 22 juin 2022, n°20-19.025 et 7 septembre 2022, n° 21-12.602) .
  2. DONNÉES PERSONNELLES & OBLIGATION DE SECURITE  : La CNIL renforce sa surveillance en matière de cybersécurité des données personnelles ( CNIL, Délibération n°SAN2022-018 du 18 septembre 2022, INFOGREFFE et Délibération n°SAN2022-017 du 3 août 2022, ACCOR).
  3. COMMUNICATION NUMERIQUE & DSA : Le Parlement européen a adopté, le 5 juillet 2022, le Règlement sur les services numériques, plus connu sous son nom en langue anglaise et l’acronyme correspondant : Digital Services Act ou DSA ( Résolution législative du Parlement européen du 5 juillet 2022 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un marché unique des services numériques).
  4. DROIT D’AUTEUR & LOGICIELS : L’action en violation d’un contrat de licence de logiciel relève-t-elle de la responsabilité contractuelle, ou bien de la responsabilité délictuelle, les régimes applicables étant différents ? Par un arrêt du 5 octobre 2022, la Cour de cassation a tranché cette question, qui défraye la chronique judiciaire depuis plusieurs années, en faveur de la responsabilité délictuelle et, plus précisément, de l’action en contrefaçon (Cour de cassation, 1ère, 5 octobre 2022, n°21-15386 ).
  5. PROTECTION DES BASES DE DONNÉES : DROIT SUI GENERIS DU PRODUCTEUR : La Cour de cassation a rejeté le pourvoi à l’encontre d’un arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 2 février 2021, qui avait admis à la protection du droit du producteur de base de données le sous-ensemble du site leboncoin.fr attribué aux annonces immobilières, et jugé que le site entreparticuliers.com avait commis, en réutilisant les informations essentielles de ces annonces au sein de son site, une extraction qualitativement spécifique en violation de ce droit. Ce faisant, la Haute juridiction infléchit sa jurisprudence antérieure, en date du 5 mars 2009 ( Cour de cassation, Civ. 1ère, 5 octobre 2022, n°20-16.307).
  6. DROIT D’AUTEUR & NFT : Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a remis le 12 juillet 2022 son rapport sur les jetons non fongibles (« JNF » ou « NFT » en anglais).
  7. FORCE MAJEURE & REMBOURSEMENT DES SOMMES AVANCÉES : Des solutions toujours aussi imprévisibles ( C our de cassation, C iv . 1ère, 6 juillet 2022, n° 21-11310 ).
  8. CONTRATS & NULLITÉ  : Un contrat conclu hors établissement qui ne respecte pas le formalisme imposé par les dispositions du Code de la consommation échappe à la nullité lorsque ces règles y sont reproduites et qu’il a été appliqué ( Cour de cassation, Civ. 1ère , 31 août 2022, n°21-12.968).

En savoir plus :

  1. MARQUE & NOM PATRONYMIQUE : Une marque antérieure ne saurait paralyser l’utilisation de bonne foi d’un nom patronymique (Cour de cassation, Com., 22 juin 2022, n°20-19.025 et 7 septembre 2022, n° 21-12.602) .

Les rapports entre marques et noms patronymiques ont été à l’honneur cet été. Après le Champagne dans l’affaire Taittinger , c’est le Cognac qui a fait l’objet d’une décision récente dans l’affaire Croizet .

L’affaire Taittinger a été tranchée au début de l’été. Par un arrêt du 22 juin 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation a en effet rejeté le pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 3 mars 2020 en rappelant que la renommée d’une marque (TAITTINGER en l’occurrence) ne saurait faire obstacle à l’usage du signe en tant que nom patronymique. En l’espèce, il a été considéré que Virginie Taittinger, ancienne salariée et associée de la maison de champagne Taittinger, pouvait utiliser son nom patronymique, y compris pour commercialiser des produits de Champagne, dès lors qu’il « n’est utilisé qu’ ‘à titre de nom de famille ou pour souligner, à travers le rappel de l’histoire familiale et de son parcours professionnel, l’expérience et le savoir-faire acquis’en matière de champagne ( Cour de cassation, com., 22 juin 2022, n°20-19.025 ). Ces utilisations de bonne foi du patronyme ne constituant ni une contrefaçon d’une marque antérieure, fut-elle renommée, ni même au demeurant une utilisation déloyale.

L’affaire Croizet est encore plus récente. Par un arrêt du 7 septembre 2022, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a en effet rejeté le pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 17 novembre 2020 au motif que « c’est justement que la cour d ‘appel a retenu qu’il avait été fait un usage de bonne foi du nom de famille « Croizet » dans la vie des affaires par M. Léopold C et la société La Maison des pierres, ce dont elle a déduit que l’action en contrefaçon par reproduction de la marque, du fait de l’usage du nom de domaine <croizet.com> devait être rejetée ». En l’occurrence, le nom de domaine reproduisant le nom patronymique « avait été créé en 2000, près de 17 ans avant les faits incriminés »et la société Croizet, titulaire de la marque antérieure CROIZET, ne contestait « pas qu’elle en avait connaissance ». Rendue sous l’empire de l’ancienne législation, la solution s’étend ainsi l’article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle dans sa version antérieure à la réforme de 2019 à l’utilisation de bonne foi du nom de famille à titre de nom de domaine alors que le texte ne visait qu’une utilisation à titre de dénomination sociale, de nom commercial ou d’enseigne.

  1. DONNÉES PERSONNELLES & OBLIGATION DE SECURITE  : La CNIL renforce sa surveillance en matière de cybersécurité des données personnelles ( CNIL, Délibération n°SAN2022-018 du 18 septembre 2022, INFOGREFFE et Délibération n°SAN2022-017 du 3 août 2022, ACCOR) .

Cybersécurité, tel est le credo de la CNIL pour cette année 2022 et cette tendance s’est vérifiée cet été. En effet, après quinze mises en demeure adressées aux opérateurs de sites web au mois de juillet pour défaut de sécurité, la CNIL a rendu deux délibérations en date du 3 août et du 18 septembre en matière de sécurité des données personnelles.

Visant le groupe ACCOR et INFOGREFFE, ces décisions sanctionnent notamment ces sociétés pour manquement à leur obligation générale de sécurité de responsable de traitement, imposée par l’article 32 du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD). Cette obligation couvre de multiples sujets pratiques tels que la robustesse des mots de passe imposée par le site, les modalités de modification de ces mots de passe et leur transmission ainsi que toute autre mesure de sécurité complémentaire.

Dans le cas du site INFOGREFFE, c’est la question du mot de passe qui a retenu l’attention de la CNIL. A la suite d’une plainte, la CNIL a effectué un contrôle auprès du service considéré. Elle a relevé, dans ce cadre, le caractère insuffisant de la robustesse des mots de passe qui étaient limités à 8 caractères maximum sans critère de complexité, ainsi que l’absence de mesure de sécurité complémentaire. D’autres manquements ont également été relevés comme la sécurité insuffisante des modalités de transmission des mots de passe, effectuée en clair par courriel pour des mots de passe non temporaires, l’absence de notification de l’utilisateur en cas de changement du mot de passe ainsi que la conservation en clair d’une base de données des mots de passe et des questions et réponses secrètes pour leur réinitialisation. Ces manquements étaient d’autant plus importants que le nombre de données personnelles concernées était volumineux, le site plus de 3,7 millions de comptes. La CNIL a ainsi condamné la société à une amende de 250 000€, au titre de ces violations de l’article 32 du RGPD, ainsi que de son article 5, à raison d’une durée de conservation des données excessive au regard du traitement en cause.

S’agissant du groupe ACCOR, la CNIL a réalisé une analyse approfondie du système de sécurité en cause. Dans son rapport d’accès, elle souligne tout d’abord le caractère insuffisant des exigences en matière de mots de passe donnant à l’outil « Adobe Campaign », qui se limitait à 8 caractères contenant au moins deux types de caractère. L’existence d’une mesure complémentaire tenant à limiter l’accès de cet outil à des terminaux connectés au réseau ACCOR n’a pas été considérée comme suffisante. Le manquement à l’article 32 du RGPD était donc constitué. La CNIL retient toutefois la mise en conformité du groupe avant la clôture de l’instruction. Autre motif de sanction, la pratique du groupe de demander une copie d’une pièce d’identité par courriel en cas de suspicion de connexion frauduleuse :

Une sanction pécuniaire a été prononcée à l’encontre du groupe ACCOR, pour un montant de 500 000€. Il convient toutefois de noter que cette amende couvre la totalité des manquements au RGPD réalisés par le groupe ACCOR, soit six griefs dont certains n’étaient pas distincts de la violation de l’obligation de sécurité édictée par l’article 32.

Tous les opérateurs de sites web proposant des comptes à leurs utilisateurs doivent donc être vigilants à l’égard de mesures de sécurité aussi simples que les caractéristiques requises d’un mot de passe d’accès auxdits comptes et que les modalités de transmission de tels mots de passe, afin de s’assurer que ces mesures respectent les exigences légales.

  1. COMMUNICATION NUMERIQUE, RESPONSABILITE & RÉGULATION : Le Parlement européen a adopté, le 5 juillet 2022, le Règlement sur les services numériques, plus connu sous son nom en langue anglaise et l’acronyme correspondant : Digital Services Act ou DSA ( Résolution législative du Parlement européen du 5 juillet 2022 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un marché unique des services numériques).

Présenté initialement par la Commission européenne en décembre 2020, le projet de Règlement sur les services numériques, déjà célèbre sous l’acronyme DSA, a franchi l’étape la plus importante du processus législatif avec son adoption par le Parlement le 5 dernier. Même s’il doit encore être adopté formellement par le Conseil européen, en principe à l’heure où nous écrivons ces lignes, le texte est suffisamment abouti pour en proposer une présentation succincte.

Prenant acte de ce que les règles issues de la directive 2000/31 du 8 juin 2000 dite « commerce électronique » sont devenues inefficaces pour lutter contre les contenus illicites en ligne et la désinformation, et du danger que représentent ces contenus pour les droits fondamentaux des et les institutions démocratiques, le texte vise à répondre au dispositif législatif existant en instaurant de nouvelles obligations à la charge de certains opérateurs, les plateformes en ligne et les moteurs de recherche, dont la violation pourra être punie de lourdes sanctions, ainsi que des mécanismes de régulation aux niveaux nationaux et européens.

Le texte est copieux (près de 300 pages dans la version de travail du Parlement), en sorte qu’il n’en sera proposé ici qu’un très bref, et non exhaustif, résumé.

En premier lieu, le Règlement énonce qu’il n’a pas d’incidence sur l’application de la directive 2000/31 précitée, qui subsiste, tout en précisant l’interprétation sur un certain nombre de points. Il faut retenir, pour l’essentiel, que le régime dérogatoire de responsabilité des prestataires de services dits “intermédiaires” selon la terminologie du DSA, c’est-à-dire principalement les fournisseurs d’accès et d’hébergement (mais aussi les opérateurs de transmission et les prestataires de stockage cache), au titre des contenus illicites qu’ils hébergent ou dont ils permettent la diffusion, sont maintenus, ses modalités d’application étant précisées, souvent par “codification” des solutions issues de la jurisprudence de la Cour de justice. Ces preuves se voient également imposer de nouvelles obligations,

En second lieu, le DSA crée deux nouvelles qualifications, les “plateformes en ligne” et les “moteurs de recherche en ligne”. La première de ces qualifications vise, selon le Règlement, une catégorie particulière de prestataires d’hébergement : ceux qui non seulement stockent des contenus, mais aussi les diffusent au public. Il fait peu de doute que cette nouvelle qualification, qui se rapproche de celle d’éditeur (non définie par le législateur et ignorée du DSA, mais qui entraîne l’application du droit commun en matière de responsabilité), donnera lieu à des débats d’interprétation qui risquent d’encombrer les prétoires.

Quoiqu’il en soit, ces plateformes en ligne sont soumises à des obligations particulières, dont certaines communes aux prestataires d’hébergement, telle que la mise en place de mécanismes de notification et d’action des contenus illicites ; d’autres obligations leurs sont propres : outre la mise en place de systèmes internes de traitement des réclamations et de mécanismes de règlement extrajudiciaire des litiges, les plateformes en ligne devront traiter prioritairement les notifications issues des “signaleurs de confiance”, émettre des rapports détaillés sur leurs activités de régulation des contenus, utiliser des interfaces en ligne non trompeuses, ou encore assurer la transparence de leurs systèmes de recommandation des contenus.

Certaines de ces obligations sont renforcées pour les très grandes plateformes, qui sont celles dont le nombre d’utilisateurs mensuels au sein de l’Union est égal ou supérieur à 45 millions ; elles doivent en outre procéder à des évaluations des risques systémiques découlant de leur activité et mettre en place des mesures pour les atténuer ainsi que des mécanismes de traitement des crises. Ces mêmes obligations pèsent aussi sur les très grands moteurs de recherche, définis de la même manière comme ceux dont le nombre d’utilisateurs au sein de l’Union est égal ou supérieur à 45 millions.

En troisième lieu, outre la promotion de normes en matière notamment d’obligation de vigilance, et de codes de conduite, le Règlement instaure, dans chaque Etat membre, un “coordinateur” des services numériques, lequel doit coopérer avec ses homologues nationaux et le nouveau “Comité européen des services numériques”, ainsi qu’avec la Commission, qui a compétence exclusive s’agissant du contrôle des très grandes plateformes et des très grands moteurs de recherche. Les pouvoirs et compétences respectifs de ces nouveaux organismes de régulation (inspirés de ce qui a été fait en matière de données personnelles), ainsi que leurs modalités de coopération, sont minutieusement organisés par le DSA ; les décisions de la Commission sont susceptibles de recours devant le Cour de justice de l’Union.

En quatrième et dernier lieu, le Règlement prévoit les sanctions applicables en cas de non-respect, par les opérateurs concernés, des obligations qu’il instaure, et en particulier des amendes pouvant aller jusqu’à 6% du chiffre d’affaires annuel de l’opérateur en cause, ces sanctions pouvant être prononcées par l’autorité nationale ou par la Commission, selon leurs champs de compétence respectifs.

Gageons que la lourdeur de ces sanctions, à l’instar de ce qui s’est passé pour le RGPD, incitera les opérateurs de services en lignes à respecter ce nouveau règlement.

 

  1. DROIT D’AUTEUR & LOGICIELS : L’action en violation d’un contrat de licence de logiciel relève-t-elle de la responsabilité contractuelle, ou bien de la responsabilité délictuelle, les régimes applicables étant différents ? Par un arrêt du 5 octobre 2022, la Cour de cassation a tranché cette question, qui défraye la chronique judiciaire depuis plusieurs années, en faveur de la responsabilité délictuelle et, plus précisément, de l’action en contrefaçon (Cour de cassation, 1ère, 5 octobre 2022, n°21-15386).

Le débat trouve sa source dans le principe français de non-cumul entre les responsabilités contractuelle et délictuelle : c’est soit l’une, soit l’autre, mais pas les deux en même temps. Or, pour certains, la violation des stipulations d’un contrat de licence de logiciel, en ce qu’elle constitue une atteinte aux droits d’auteur afférents audit logiciel, relève de l’action en contrefaçon et donc de la responsabilité délictuelle ; pour d’autres, au contraire, elle relève de la responsabilité contractuelle puisqu’est en cause le respect des clauses du contrat de licence. Les enjeux sont de taille, et concrets : ainsi, le choix de la responsabilité délictuelle permet, notamment, le recours à la procédure de saisie-contrefaçon et une indemnisation du préjudice établie sur la base des règles spéciales en la matière, tandis que le choix de la responsabilité contractuelle exclut le recours à la saisie-contrefaçon, permet au défendeur d’invoquer d’’éventuelles clauses contractuelles limitant sa responsabilité et, en tout état de cause, limite le préjudice réparable à ce qui était prévisible pour les parties.

Dans l’affaire rapportée, la cour d’appel de Paris, incertaine de la solution, a dans un premier temps saisi la Cour de Justice de l’Union Européenne d’une question préjudicielle en interprétation des directives 2004/48 relative à la protection des droits de propriété intellectuelle et 2009/21 relative aux droits d’auteur dans la société de l’information. Mais la Cour de justice, dans son arrêt en date du 18 décembre 2019, n’a pas, logiquement, tranché ce débat relevant du droit interne ; elle s’est contentée de dire pour droit que, quel que soit le régime de responsabilité applicable selon le droit national, le titulaire des droits d’auteur afférents à un logiciel devait bénéficier, en cas de violation de ceux-ci, des garanties prévues par la directive 2004/48.

Ne pouvant plus se dérober face à la difficulté, la cour de Paris, dans la même affaire, a, par un arrêt en date du 19 mars 2021, jugé le titulaire des droits d’auteur afférents au logiciel litigieux irrecevable à agir sur le fondement de l’action en contrefaçon à l’encontre de son cocontractant qui n’avait pas respecté les termes du contrat de licence, au motif que l’action trouvait son fondement dans un manquement contractuel. Ce faisant, la cour de Paris décidait de trancher la question en faveur de la responsabilité contractuelle, ce qui était tout de même surprenant au regard de l’arrêt de la Cour de justice, car on voyait mal comment le titulaire des droits d’auteur pouvait encore, dans cette hypothèse, se prévaloir des garanties prévues par la directive 2004/48.

De fait, dans l’arrêt rapporté, publié au Bulletin, la Haute juridiction, après avoir rappelé la décision de la Cour de Justice, relève d’une part que le régime de la responsabilité contractuelle limite le préjudice réparable aux dommages et intérêts prévus par les parties ou qui pouvaient l’être à la date du contrat (ex-article 1150, nouvel article 1231-3 du code civil) et, d’autre part, que l’article 145 du code de procédure civile, applicable en droit commun et donc en matière de responsabilité contractuelle, ne permet pas la saisie réelle des œuvres arguées de contrefaçon. Il en résulte, selon la Cour de cassation, que le titulaire des droits d’auteur se trouve privé, dans cette hypothèse, (i) des modalités spéciales de réparation du préjudice en matière de contrefaçon (résultant de l’article 13 de la directive 2004/48 et de sa transposition en droit français à l’article L.331-1-3 du CPI) et (ii) de la procédure spéciale de saisie-contrefaçon, permettant la saisie réelle des objets argués de contrefaçon (article 7 de la directive 2004/48 et article L.332-1 du CPI). La solution de l’arrêt d’appel ne respectait donc pas l’exigence posée par la Cour de Justice dans son arrêt du 18 décembre 2019 et la Haute juridiction en prononce la cassation pour violation, notamment, des articles 7 et 13 de la directive précitée et de l’article L.335-2 du CPI, qui définit la contrefaçon.

Désormais, le titulaire des droits d’auteur afférents à un logiciel peut donc agir en contrefaçon et bénéficier du régime spécial associé à cette action, même si l’atteinte à ses droits résulte de la violation d’un contrat afférent au logiciel. Cette solution, qui coincide avec celle applicable aux autres œuvres de l’esprit, est heureuse.

 

  1. PROTECTION DES BASES DE DONNÉES :  Droit sui generis du producteur : La Cour de cassation a rejeté le pourvoi à l’encontre d’un arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 2 février 2021, qui avait admis à la protection du droit du producteur de base de données le sous-ensemble du site leboncoin.fr consacré aux annonces immobilières, et jugé que le site entreparticuliers.com avait commis, en réutilisant les informations essentielles de ces annonces au sein de son propre site, une extraction qualitativement substantielle en violation de ce droit (Cour de cassation, Civ. 1ère, 5 octobre 2022, n°20-16.307).

L’arrêt rapporté, publié au bulletin, mérite l’attention à un double titre.

En premier lieu, s’agissant des conditions d’accès à la protection du producteur de base de données : on sait que cette protection est subordonnée à la preuve, par celui qui l’invoque, d’un investissement substantiel dans la collecte, la vérification ou la présentation des données. En l’espèce, la Cour de cassation approuve l’arrêt d’appel d’avoir notamment tenu compte, pour l’octroi de cette protection, d’une part des investissements de communication visant à inciter les utilisateurs à déposer des annonces sur le site leboncoin.fr et, d’autre part, des investissements relatifs au stockage de ces annonces, rejetant ainsi un argument du pourvoi faisant valoir qu’il s’agissait d’investissements relatifs à la création des données et non à la collecte de données préexistantes.

En effet, dans des arrêts célèbres du 9 novembre 2004, la Cour de Justice des Communautés européennes avait dit pour droit que seuls les investissements relatifs à la collecte d’éléments préexistants ouvraient droit à la protection, à l’exclusion de ceux dédiés à la création de données. Et, dans un arrêt du 5 mars 2009, la première chambre civile de la Cour de cassation avait approuvé une cour d’appel d’avoir refusé la protection du droit du producteur de base de données à un site d’annonces immobilières, au motif principal que ces annonces étaient créées par l’exploitant du site et ne constituaient donc pas des données préxistantes. Le pourvoi tentait donc de se placer dans ce sillage, en vain. Cet infléchissement par la Haute juridiction de sa jurisprudence antérieure doit être approuvé, car les données composant les annonces, même si ces dernières sont, le cas échéant, mises en forme par le site incluant la base de données, sont évidemment préexistantes à la constitution de cette base. Dès lors que leur collecte nécessite des investissements substantiels, ladite base est éligible à la protection.

En second lieu, s’agissant de l’atteinte au droit du producteur de base de données, la Cour de cassation approuve également l’arrêt d’appel d’avoir jugé que le site du demandeur au pourvoi, en reprenant les informations essentielles (localisation, surface, prix, description et photographie du bien) de chaque annonce immobilière parue sur leboncoin.fr, avait procédé à une extraction qualitativement substantielle de la base de données constituée de ces annonces, laquelle était subordonnée à l’autorisation du producteur. Ce faisant, la Cour de cassation écarte notamment un argument du pourvoi, usuel en la matière, selon lequel le site litigieux s’était contenté d’indexer les annonces présentes sur leboncoin.fr. Cette solution, conforme, à notre sens, à l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne du 19 décembre 2013 dit « Innoweb » (à propos d’un site d’annonces de véhicules d’occasion) mérite également l’approbation.

 

  1. DROIT D’AUTEUR & NFT : Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a remis, le 12 juillet 2022, son rapport sur les jetons non fongibles (ou « JNF »), plus connus sous leur acronyme anglais de « NFT » (Rapport CSPLA sur les NFTs, établi par Jean Martin et Pauline Hot).

Après avoir indiqué, dans un premier temps, ce que ne saurait être, sauf exceptions, un jeton non fongible (un certificat d’authenticité, une œuvre d’art, un support de l’œuvre d’art), puis, dans un second temps, ce qu’il pourrait être (un contrat, un instrument de gestion des droits), la mission propose de considérer le jeton non fongible « comme un titre de propriété sur le jeton inscrit dans la blockchain, auquel peuvent être associés d’autres droits sur le fichier numérique vers lequel il pointe, dont l’objet, la nature, et l’étendue varient en fonction de la volonté de son émetteur exprimée par les choix techniques et éventuellement juridiques associés au smart contract ».

En ce qui concerne plus spécifiquement la propriété intellectuelle, le rapport relève que l’acquéreur d’un jeton non fongible n’est pas nécessairement détenteur des droits patrimoniaux attachés au fichier numérique qui lui est associé et, partant, qu’il ne peut pas réaliser, sauf mention expresse en ce sens, d’actes d’exploitation de cette œuvre ou interdire à un tiers de réaliser de tels actes. Le rapport indique, par ailleurs, que la création d’un jeton non fongible ne fait pas obstacle à l’application du droit de suite, si les conditions légales définies dans le code de la propriété intellectuelle sont réunies. Ainsi, sauf conditions générales prévues par la plateforme ou contractualisation explicite, les jetons non fongibles ne sont pas automatiquement cédés avec l’ensemble des droits patrimoniaux associés à ces fichiers.

A cet égard, l’un des enjeux essentiels pour les auteurs du rapport porte sur la responsabilisation des plateformes sur lesquelles s’échangent les jetons non fongibles. Afin que ces plateformes assurent le respect de la propriété littéraire et artistique, ils suggèrent leur encadrement en tant que fournisseurs de services de partage de contenus en ligne au sens de l’article 17 de la directive 2019/790 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique. Cette qualification ne saurait toutefois à notre sens être exclusive, certaines plateformes pouvant être qualifiées d’éditeur ou d’hébergeur, leur rôle étant très disparate d’une plateforme à l’autre.

Le rapport contient, en outre, une série de recommandations visant, entre autres, à assurer une meilleure information des acquéreurs, des auteurs, des ayants droit et des plateformes sur les droits d’auteur, ainsi qu’à établir une « charte de bonnes pratiques » avec les plateformes et les représentants du secteur. A plus long terme, les auteurs du rapport préconisent de parvenir à une coordination européenne afin de sensibiliser des plateformes majoritairement extra-européennes. De surcroit, plusieurs pistes de réflexions sont suggérées autour des questions tenant à la mise en place de tiers vérificateurs des contenus associés aux jetons non fongibles échangés sur la blockchain, ainsi qu’aux modalités techniques permettant d’assurer l’effectivité des décisions judiciaires pour lutter contre la contrefaçon.

Ce rapport constitue une synthèse complète des problématiques posées par les jetons non fongibles, ainsi que des opportunités qu’ils offrent en particulier dans le secteur culturel. Des pistes de reflexions sont avancées, ainsi que certaines préconisations pratiques. La question de la qualification juridique des NFTs aurait mérité à notre sens des développements plus substantiels, ainsi que celle de leur environnement technique, notamment s’agissant de leurs liens avec la blockchain et les conséquences en résultant du fait de propriétés techniques de cette dernière (anonymat et identification des auteurs, y compris de contrefaçon ; caractère décentralisé et identification des acteurs notamment en l’absence de plateforme jouant le rôle d’intermédiaire).

 

  1. FORCE MAJEURE & REMBOURSEMENT DES SOMMES AVANCÉES : Des solutions toujours aussi imprévisibles (Cour de cassation, 1ère, 6 juillet 2022, n° 21-11310).

Avec la réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations réalisée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, modifiée par la loi n° 2018-287 du 11 avril 2018 qui était censée seulement la ratifier, la notion de force majeure a été précisée, tout comme ses conséquences. L’article 1218 du code civil précise ainsi désormais en son alinéa 1er qu’« il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur ». Et l’alinéa 2 d’en préciser les effets : « Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »

Simple en apparence, le dispositif semble de prime abord répondre parfaitement à l’objectif poursuivi par la réforme, d’instaurer des « règles lisibles et prévisibles ». En apparence seulement, ainsi que le montre l’arrêt rendu le 6 juillet 2022 par la Cour de cassation. Le litige portait sur la question de savoir si l’acompte versé par de futurs époux en application d’un contrat de réservation d’une salle pour leur mariage prévu les 27 et 28 juin 2020 devait être remboursé au bailleur après le report de la cérémonie puis la résolution du contrat en raison de la crise sanitaire liée à l’épidémie du COVID-19 et ce alors que le contrat stipulait « qu’en cas d’annulation de la manifestation par le client, le montant de la location resterait intégralement dû à la société, sauf cas de force majeure ». Les premiers juges ont fait droit à la demande de remboursement et ont en conséquence ordonné la restitution de l’acompte de 1650 euros avec intérêts au taux légal. La décision a été approuvée par la Cour de cassation dans l’arrêt commenté au motif que : « c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation et sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes que la cour d’appel a estimé, au vu des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, qu’était caractérisé un cas de force majeure rendant impossible l’exécution des obligations contractuelles et justifiant, en application de la clause du contrat, un remboursement de l’acompte versé ».

En équité, la décision se comprend aisément. Juridiquement, elle a été critiquée en ce qu’elle remettrait en cause deux solutions, souvent présentées comme évidentes : d’une part, la force majeure ne profiterait qu’au seul débiteur et ne pourrait pas être invoquée par le créancier et, d’autre part, la force majeure financière n’existerait pas, l’obligation de paiement d’une somme d’argent étant toujours susceptible d’exécution. Ces questions sont en réalité complexes et n’ont jamais été tranchées en jurisprudence de manière homogène. Et ce qui était vrai avant la réforme de 2016, reste vrai après puisque la décision précitée contredit ouvertement une décision à peine plus ancienne rendue par la même première chambre civile de la Cour de cassation le 25 novembre 2020, qui avait affirmé, au visa de l’article 1218 alinéa 1er du code civil, que « le créancier qui n’a pas pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure » (Cour de cassation, civ. 1, 25 novembre 2020, n° 19-21.060). Par cette décision, la Cour de cassation avait cassé et annulé la décision des premiers juges ayant prononcé à la demande de deux époux la résolution d’un contrat (en l’occurrence d’hébergement auprès d’une chaine thermale) et une indemnisation alors que les époux avaient été contraints de mettre un terme anticipé à leur séjour pour un cas de force majeure. Remboursement dans le premier cas ; refus dans le second. Les solutions issues de la réforme de 2016 ne sont donc pas si « prévisibles » que cela.

 

  1. CONTRAT & NULLITÉ : Un contrat conclu hors établissement qui ne respecte pas le formalisme imposé par les dispositions du Code de la consommation échappe à la nullité lorsque ces règles y sont reproduites et qu’il a été exécuté volontairement (Cour de cassation, Civ. 1ère, 31 août 2022, n°21-12.968).

Dans un arrêt rendu le 31 août 2022, la Cour de cassation précise les conditions dans lesquelles un contrat qui ne respecte pas le formalisme imposé par les règles du code de la consommation n’encourt pas de nullité par l’effet du mécanisme de la confirmation tacite. Pour rappel, ce mécanisme permet la survivance du contrat lorsque la partie qui pourrait se prévaloir de la nullité a exécuté volontairement le contrat, en connaissance du vice qui l’affecte.

En l’espèce, un consommateur ayant conclu avec un professionnel un contrat « hors établissement », au sens du code la consommation, a agi en nullité dudit contrat, au motif qu’il ne respectait pas le formalisme édicté par le code précité. Le contrat avait été exécuté volontairement par le demandeur, de sorte que la première condition d’application de la confirmation tacite était remplie et qu’il restait à caractériser la seconde, à savoir la connaissance par celui-ci du vice. Pour la Cour d’appel, le fait que les dispositions du code de la consommation, prescrivant le formalisme non respecté, étaient reproduites dans les conditions générales figurant au verso du bon de commande, était insuffisant à faire connaître à l’acheteur le vice affectant le contrat.

Cette motivation n’est toutefois pas approuvée par la Cour de cassation qui affirme, au contraire, que « la reproduction lisible, dans un contrat conclu hors établissement, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à ce type de contrat, permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions ». Il en ressort qu’en faisant figurer dans un contrat le texte des règles précitées de manière lisible, celui-ci échappera à la nullité pour non-respect de ces règles, sous réserve qu’il ait été exécuté volontairement par la partie qui s’en prévaut.

Si cette solution, favorable à la sauvegarde de la force obligatoire du contrat en dépit des règles protectrices du droit de la consommation, a été rendue en matière de contrat conclu hors établissement, il n’est pas exclu qu’elle puisse être appliquée à d ‘autres types de contrats réglementés par le Code de la consommation, voire à des contrats pertinents du droit commun.

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« Les NFTs : de la valorisation à la contrefaçon des droits d’auteur », intervention de Xavier Près, Université de Toulouse, 13 octobre 2022

Cycle de conférence NFT

Intervention de Xavier Près sur le thème : « Les NFTs : de la valorisation à la contrefaçon des droits d’auteur », jeudi 13 octobre 2022

intervention lors de la conférence « Les NFTs : quelles stratégies pour quels enjeux ? », premier épisode d’un cycle de 4 conférences en septembre, octobre, novembre et décembre 2022 intitulé  « LE DROIT À LE DROIT À L’ÉPREUVE D’UN L’ÉPREUVE D’UN MONDE VIRTUEL MONDE VIRTUEL »

Cycle de conférences organisé par l’équipe de recherche en propriété intellectuelle et nouvelles technologies de Toulouse et le Centre de droit des affaires de l’Université Toulouse I Capitole (Épitoul)

La conférence est accessible en ligne sur YouTube

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Lettre d’information – Juin 2022

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Au sommaire :

1. DONNÉES PERSONNELLES & COOKIES WALLS : La CNIL propose des critères permettant d’apprécier la légalité du recours à un « mur de traceurs » (CNIL, Communiqué « Cookie walls : la CNIL publie des premiers critères d’évaluation », 16 mai 2022).
2. MUSIQUE & DROITS VOISINS : Les acteurs professionnels du monde de la musique se sont entendus sur les nouvelles modalités de rémunération des artistes-interprètes concernant l’exploitation en streaming (Accord relatif à la garantie de rémunération minimale inscrite à l’article L.212-14 du Code de la Propriété Intellectuelle, 12 mai 2022).
3. MARQUE & FORCLUSION PAR TOLÉRANCE : Pour interrompre le délai de forclusion par tolérance, une mise en demeure doit nécessairement être suivie d’un recours juridiquement contraignant (Cour de Justice de l’UE, 19 mai 2022, C-466/20, EU:C:2022:400, Heitec AG / Heitec Promotion GmbH – RW).
4. DROIT D’AUTEUR & LIBERTÉ D’EXPRESSION : La Cour de Justice de l’Union européenne, saisie d’un recours en annulation de l’article 17 de la directive 2019/790 du 17 avril 2019, a jugé le 26 avril dernier que la restriction apportée par cet article à la liberté d’expression des internautes dans le but de protéger le droit d’auteur n’était pas disproportionnée et a donc validé ce texte. Mais au prix d’une interprétation de ce dernier qui conduit à s’interroger sur ce qui en subsiste (CJUE, gde ch., 26 avril 2022, aff. C-401/19).
5. SPORT & FAUX BILLETS : Après les incidents qui ont émaillé la finale de la Champions League opposant Liverpool au Real Madrid au Stade de France le 28 mai 2022, la notion de « faux billets » a déboulé dans la presse et, avec elle, des confusions qui empêchent toute compréhension des évènements (Décryptage).
6. « NFT : DROIT & MARCHÉ » : C’était le titre de notre première matinée débats (Matinée débats, VARET PRÈS KILLY, 8 mai 2022).
7. DOMAINES NATIONAUX & IMAGE DES BIENS : 16 domaines nationaux disposent désormais de la faculté de contrôler l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui les composent (Journal Officiel du 19 juin 2022).

En savoir plus :

1. DONNÉES PERSONNELLES & COOKIES WALLS : La CNIL propose des critères permettant d’apprécier la légalité du recours à un « mur de traceurs » (CNIL, Communiqué « Cookie walls : la CNIL publie des premiers critères d’évaluation », 16 mai 2022).

Face à l’obligation, issue du Règlement général sur la protection des données (Règlement (UE) 2016/679, dit « RGPD »), de recueillir le consentement de l’internaute préalablement à un dépôt de cookies ou d’autres traceurs, de nombreux éditeurs de sites web ont choisi de recourir à un cookie wall (ou « mur de traceurs »). Il s’agit d’un dispositif conditionnant l’accès à un site à l’acceptation par l’internaute du dépôt sur son terminal de traceurs ou, en cas de refus, à la fourniture par ce dernier d’une contrepartie. Le Conseil d’Etat a jugé que l’exigence d’un consentement libre, également prévue par le RGPD, n’entraîne pas une interdiction générale de cette pratique et que sa légalité doit être appréciée au cas par cas, en tenant compte notamment de l’existence d’alternative(s) réelle(s) et satisfaisante(s) proposée(s) en cas de refus du dépôt de traceurs par l’internaute. Les critères récemment publiés par la CNIL visent ainsi à permettre aux éditeurs de sites web recourant à un cookie wall ou souhaitant y recourir d’en apprécier sa légalité.

Premièrement, l’éditeur doit démontrer que l’obligation imposée à l’internaute d’accepter le dépôt de traceurs pour accéder au site, sans fournir une contrepartie, est limitée aux traceurs dont les finalités permettent une juste rémunération de l’éditeur du site, de sorte que le refus de consentir à d’autres traitements ne doit pas empêcher ce libre accès.

Deuxièmement, la CNIL recommande aux éditeurs de proposer aux internautes qui refusent d’accepter le dépôt de traceurs pour accéder au contenu ou au service fourni sur leur site, de fournir une alternative réelle et équitable permettant cet accès. A défaut, l’éditeur du site doit être en mesure de démontrer que le service ou le contenu est disponible sur un autre site dont l’accès doit, d’une part, être facile pour l’internaute et d’autre part, non conditionné à son consentement au dépôt de traceurs.

Une des alternatives à l’obligation de consentir au dépôt de traceurs peut être le paiement par l’internaute d’une somme d’argent (appelé « paywall »), que ce soit sous la forme d’un abonnement payant ou d’un paiement ponctuel, sous réserve que son montant soit raisonnable. Ce caractère raisonnable doit être apprécié au cas par cas et l’éditeur du site doit être en mesure de justifier du montant choisi. L’éditeur d’un site peut également conditionner l’accès à son site, soit à l’acceptation de traceurs, soit à la création par l’internaute d’un compte utilisateur. Cette alternative doit alors être, selon la CNIL, justifiée par rapport à la finalité visée.

La mise en place d’un cookie wall nécessite ainsi de procéder en amont à une analyse précise des traitements de données concernés ainsi que des modalités de mise en œuvre de l’alternative à l’acceptation des traceurs, étant précisé que le respect des critères préconisés par la CNIL n’exclut par ailleurs en aucun cas l’application des autres principes prévus par le RGPD (information, limitation de la collecte de données à celles nécessaires aux objectifs poursuivis, etc.).

2. MUSIQUE & DROITS VOISINS : Les acteurs professionnels du monde de la musique se sont entendus sur les nouvelles modalités de rémunération des artistes-interprètes concernant l’exploitation en streaming (Accord relatif à la garantie de rémunération minimale inscrite à l’article L.212-14 du Code de la Propriété Intellectuelle, 12 mai 2022).

Transposition de la directive européenne sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique, l’ordonnance du 12 mai 2021 a introduit dans l’ordre juridique français le principe de garantie d’une rémunération minimale au bénéfice des artistes-interprètes de phonogrammes au titre des exploitations en streaming, à l’article L.212-14 du Code de la Propriété Intellectuelle.

L’exécutif français avait laissé douze mois aux acteurs professionnels de l’industrie pour organiser les modalités de cette garantie minimale. Un délai respecté par les parties, puisqu’elles ont signé le 12 mai 2022, un accord interprofessionnel définissant les nouveaux standards de l’industrie en la matière, avec un petit bémol concernant son champ d’application, excluant les phonogrammes incorporés dans un autre contenu protégé, comme les bandes originales de films.

Ainsi, les parties se sont accordées sur un taux de redevances minimal, un taux et une durée maximale d’abattement ainsi que sur une avance minimale garantie par le producteur. Dans un souci d’équilibre, ces rémunérations seront modulées selon la catégorie d’artistes-interprètes concernés, le type de redevances touchées (proportionnelle ou forfaitaire), ainsi que la relation contractuelle entre le producteur et l’éditeur du service de musique en ligne (la plateforme de streaming). Enfin, l’accord établit des règles relatives aux streams eux-mêmes : seuls les streams payants de plus de trente secondes seront pris en compte dans les calculs.

Le taux de redevance des artistes-interprètes principaux varie en fonction du statut du producteur. Ainsi, dans le cas où ce dernier est son propre distributeur auprès de plusieurs éditeurs de service de musique en ligne, les artistes-interprètes devront percevoir un minimum de 10% des sommes reversées au producteur au titre du streaming, hors période d’abattement. En cas de contrat de licence exclusive entre le producteur et un éditeur de service de musique en ligne, ce taux minimal devra être de 28 % sur les sommes nettes encaissées au titre du streaming, sans possibilité d’abattementEnfin, il sera ramené à 11% sur les sommes nettes encaissées par le producteur, hors période d’abattement, dans le cas où ce dernier n’est pas distributeur, sans pouvoir être inférieur à 10% des sommes encaissées par le distributeur. Ces taux pourront faire l’objet d’une bonification en cas de franchissement de certains seuils de streams.

La rémunération minimale fera l’objet d’une répartition en cas de pluralité d’artistes-interprètes ou en cas de sample. L’artiste-interprète pourra aussi y renoncer dans le cadre de projets caritatifs.

Les musiciens et les artistes-interprètes rémunérés, par exception, forfaitairement, auront, eux aussi, droit à une rémunération minimale correspondant respectivement à 1,5% et 2,5% de leur cachet de base. Ces derniers disposent en outre d’une garantie de rémunération complémentaire selon le succès du phonogramme.

Enfin l’applicabilité dans le temps de l’accord couvre une période assez large. En effet, s’il est entré en vigueur à compter du 12 mai 2022, certaines exceptions ont été stipulées. D’une part, concernant les exploitations de phonogrammes inédits des artistes interprètes titulaires d’un contrat d’enregistrement exclusif signé entre le 6 juillet 2017 et le 12 mai 2022 et commercialisés à compter du 12 mai 2022, les taux minimaux seront applicables dès cette date. D’autre part, la rémunération complémentaire des musiciens ou artistes-interprètes concernés sera, elle, applicable au 1er juillet 2022. Notons aussi qu’en cas d’extension par arrêté ministériel, les dispositions de l’accord devraient être applicables rétroactivement à tous les acteurs du milieu à compter du 1er juillet 2022.

3. MARQUE & FORCLUSION PAR TOLÉRANCE : Pour interrompre le délai de forclusion par tolérance, une mise en demeure doit nécessairement être suivie d’un recours juridiquement contraignant (Cour de Justice de l’UE, 19 mai 2022, C-466/20, EU:C:2022:400, Heitec AG / Heitec Promotion GmbH – RW).

La forclusion par tolérance est le principe selon lequel, le titulaire d’une marque antérieure ou d’un autre droit antérieur qui a toléré, pendant cinq années consécutives, l’usage d’une marque postérieure en connaissance de cet usage ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure pour les produits ou services pour lesquels la marque a été utilisée, à moins que son dépôt n’ait été effectué de mauvaise foi. Comme le rappelle la Cour de justice dans cet arrêt, la finalité de la forclusion est de conférer, à l’issue de ce délai, « la certitude au titulaire de la marque postérieure que l’usage de celle-ci ne peut plus être contesté, par quelque voie de droit que ce soit, par celui l’ayant sciemment toléré pendant une période ininterrompue de cinq années ». La forclusion par tolérance est prévue tant par le droit de l’Union européenne que par le droit national.

En l’espèce, la Cour fédérale de justice allemande avait interrogé la Cour de justice sur le point de savoir si un acte, tel qu’une mise en demeure, par lequel le titulaire d’une marque antérieure ou d’un autre droit antérieur s’oppose à l’usage d’une marque postérieure mais sans pour autant introduire un recours administratif ou juridictionnel, est susceptible d’empêcher la forclusion par tolérance.

À cette question, la Cour de justice répond qu’une mise en demeure n’est susceptible d’interrompre le délai de forclusion par tolérance que si le titulaire de la marque antérieure ou d’un autre droit antérieur a, après avoir constaté le refus du destinataire de cette mise en demeure de se conformer à celle-ci, fait le nécessaire afin d’obtenir une solution juridiquement contraignante. En revanche, si le titulaire ne poursuit pas ses efforts dans un « délai raisonnable » pour remédier à cette situation, le cas échéant par l’introduction d’un recours administratif ou juridictionnel, « il doit en être déduit que ce titulaire s’est abstenu de prendre les mesures dont il disposait pour faire cesser la prétendue atteinte à ses droits ».

La Cour précise par ailleurs que la forclusion interdit non seulement de demander la nullité d’une marque postérieure et la cessation de l’usage de celle-ci, mais « empêche également de formuler des demandes annexes ou connexes, telles que des demandes visant à l’octroi de dommages et intérêts, à la fourniture de renseignements ou à la destruction de produits ».
Par cette décision, la Cour rappelle que l’instauration d’un délai de forclusion par tolérance permet de s’assurer que la protection conférée par une marque antérieure à son titulaire demeure limitée aux cas où celui-ci se montre « suffisamment vigilant ».

4. DROITS D’AUTEUR & LIBERTÉ D’EXPRESSION : La Cour de Justice de l’Union européenne, saisie d’un recours en annulation de l’article 17 de la directive 2019/790 du 17 avril 2019, a jugé le 26 avril dernier que la restriction apportée par cet article à la liberté d’expression des internautes dans le but de protéger le droit d’auteur n’était pas disproportionnée et a donc validé ce texte. Mais au prix d’une interprétation de ce dernier qui conduit à s’interroger sur ce qui en subsiste (CJUE, gde ch., 26 avril 2022, aff. C-401/19).

On sait que l’article 17 de la Directive 2019/790 instaure un régime spécial de responsabilité des grandes plateformes de partage de contenus en ligne au titre du droit d’auteur et des droits voisins susceptibles de protéger ces contenus, et qu’il est le fruit de longues et difficiles discussions ayant abouti à un compromis précaire.

Pour preuve, la République de Pologne a, peu après l’adoption de la directive, saisi la Cour de Justice d’un recours en annulation de ce texte, au nom de la liberté d’expression.
Selon cet Etat, les obligations pesant, en vertu de l’article 17, sur les fournisseurs de services de partage de faire leurs meilleurs efforts pour empêcher (i) le téléversement initial des contenus protégés pour lesquels les titulaires de droits leur ont communiqué des informations permettant de les identifier et (ii) de nouveaux téléversements de contenus supprimés à la suite d’une notification, imposent à ces opérateurs de recourir à des outils informatiques automatisés de reconnaissance et de filtrage de contenus.

Or, selon la Pologne, l’usage systématique de tels outils implique l’analyse préventive de l’ensemble des contenus que les utilisateurs envisagent de téléverser, et cela avant leur mise en ligne effective. En outre, cet usage peut avoir pour effet d’empêcher la mise à disposition du public de contenus dont certains sont licites (notamment car ils bénéficient d’une exception au droit d’auteur ou relèvent du domaine public). Ces deux conséquences entraîneraient une restriction disproportionnée à la liberté d’expression des internautes.

Au terme d’une analyse approfondie du texte de l’article 17, la Cour de Justice estime que si l’usage des outils de filtrage précités s’impose, de fait, aux fournisseurs de services de partage de contenus, ces outils n’ont pour effet ni d’imposer à ces derniers une obligation générale de surveillance des contenus, prohibée par l’article 17 lui-même, ni d’empêcher le jeu des exceptions au droit d’auteur, à la condition que les fournisseurs de services de partage ne soient contraints de bloquer ex ante que les contenus dont l’illicéité ne nécessite pas d’appréciation juridique autonome de leur part ; ce qui revient à dire que les fournisseurs de services de partage ont seulement l’obligation de bloquer les contenus manifestement contrefaisants – c’est-à-dire ceux dont le fichier est identique, ou quasiment identique, au marquage numérique communiqué en amont par les titulaires de droits. En revanche, les fournisseurs de services de partage doivent permettre la mise en ligne de tous les autres fichiers, pour laisser s’opérer le jeu des exceptions au droit d’auteur. Les titulaires de droits ne pourront donc contester cette mise en ligne qu’ex post, en notifiant aux fournisseurs de services ceux de ces contenus dont ils estiment qu’ils portent atteinte à leurs droits, ce qui est un retour, certes partiel, au droit antérieur (sous l’empire du régime des fournisseurs d’hébergement édicté par l’article 14 de la directive 2000/31, alors même que l’article 17 écarte le jeu de ce texte).

L’interprétation de l’article 17 ainsi donnée par la Cour de Justice opère un renversement complet par rapport à celle qui prévalait en France jusqu’à l’arrêt rapporté : en effet, on considérait que les fournisseurs de services de partage pouvaient bloquer ex ante tous les contenus pour lesquels les titulaires de droits leur avaient fourni le marquage numérique pertinent. Et ce n’était qu’ensuite, ex post, que l’internaute estimant que son contenu avait été bloqué de façon illégitime car il relevait, par exemple, d’une exception au droit d’auteur, pouvait former un recours contre ce blocage pour obtenir, si sa position apparaissait fondée, que ledit contenu soit mis en ligne.

D’ailleurs, il n’est pas certain que le texte de transposition en droit français de l’article 17 (v. l’article L.137-4 nouveau du code de la propriété intellectuelle), soit conforme à l’arrêt rapporté. Affaire à suivre, donc.

5. SPORT & FAUX BILLETS : Après les incidents qui ont émaillé la finale de la Ligue des Champions opposant Liverpool au Real Madrid au Stade de France le 28 mai 2022, la notion de « faux billets » a déboulé dans la presse et, avec elle, des confusions qui empêchent toute compréhension des évènements (Décryptage).

En droit français, l’organisateur juridique d’une compétition sportive dispose d’un droit portant sur la manifestation sportive qu’il organise. C’est un droit de propriété qui est défini à l’article L. 333-1 du code du sport : « Les fédérations sportives, ainsi que les organisateurs de manifestations sportives mentionnés à l’article L. 331-5 du code du sport, sont propriétaires du droit d’exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu’ils organisent ».

Ce droit de propriété, ou « droit d’exploitation » ou « monopole d’exploitation », a été consacré en droit français en 1992. Il confère aux organisateurs de compétitions et manifestations sportives un droit exclusif sur l’exploitation de leurs évènements, leur donnant ainsi le droit de contrôler toutes les utilisations patrimoniales de ces manifestations sportives, en particulier la billetterie.

Un faux billet est un billet qui n’est pas émis par l’organisateur juridique de la manifestation sportive. Il ne permet pas, par voie de conséquence, d’accéder à la manifestation sportive. De fait, le spectateur putatif sera recalé à l’entrée du stade, son faux billet ne pouvant être validé informatiquement. A contrario, un billet officiel est émis par l’organisateur de cette manifestation.

Les faux billets constituent une escroquerie, prévue et réprimée sur le fondement de l’article 313-1 du code pénal. Les peines sont lourdes. Le texte précise que « L’escroquerie est punie de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ».

En outre et dès lors que seraient reproduits sur les faux billets les marques et éléments d’identité visuelle susceptibles d’être protégés au titre du droit d’auteur (logo, dessins, etc.) de l’organisateur de la manifestation sportive, la qualification de contrefaçon de marque et/ou de droit d’auteur, selon les cas, pourra aussi être retenue. La contrefaçon constitue un délit ; elle est notamment pénalement sanctionnée par les articles L. 335-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle pour la contrefaçon de droit d’auteur et par les articles L. 716-9 et suivants du même code pour la contrefaçon de marque. Les peines varient, mais sont, au minimum, de 3 ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende.

La revente illicite de « billets officiels » se distingue de celle des « faux billets » en ce que, à la différence des seconds, les premiers sont émis par l’organisateur de la manifestation sportive, mais revendus sans son autorisation. Il s’agit donc bien de billets officiels permettant d’accéder à la manifestation sportive, de franchir les portillons d’entrée, et par conséquent, les dispositifs de sécurité et de contrôle, et in fine de trouver sa place. Le délit est toutefois constitué dès lors que ces billets sont revendus sans l’autorisation de l’organisateur de la manifestation sportive – c’est-à-dire par un tiers qui n’est pas agréé par ce dernier, et à condition que la manifestation se déroule en France.

Conformément à l’article 313-6-2 du code pénal : « Le fait de vendre, d’offrir à la vente ou d’exposer en vue de la vente ou de la cession ou de fournir les moyens en vue de la vente ou de la cession des titres d’accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, de manière habituelle et sans l’autorisation du producteur, de l’organisateur ou du propriétaire des droits d’exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle, est puni de 15 000 € d’amende. Cette peine est portée à 30 000 € d’amende en cas de récidive ».

L’absence d’autorisation de l’organisateur de la manifestation sportive constitue donc la pierre angulaire du délit. L’exigence de cette autorisation est fondée sur le droit de propriété que détient l’organisateur sur la manifestation qu’il organise, conformément au principe édicté par l’article L.333-1 du code du sport.

La revente illicite de billets peut également s’accompagner d’agissements contrefaisants dès lors que la revente de billets pour une manifestation se déroulant en France s’accompagnera de la reproduction, sans autorisation de leur titulaire, des marques de l’organisateur de la manifestation sportive. L’infraction sera alors réprimée dans les mêmes termes que ceux concernant la contrefaçon applicable à de faux billets.

6. « NFT : DROIT & Marché » : C’était le titre de notre première matinée débats (Matinée débats, VARET PRÈS KILLY, 8 mai 2022).

La société d’avocats VARET PRÈS KILLY a organisé une matinée débats ayant pour titre « NFT, droit et marché » le jeudi 5 mai 2022 à l’Institut national du patrimoine (INP).

Le programme était divisé en deux parties : la première partie « Les NFT et le droit » était consacrée aux aspects juridiques avec les interventions de nos trois associés : Vincent Varet, Xavier Près et Rhadamès Killy.

La deuxième partie s’est déroulée sur la forme d’une table ronde intitulée « Les NFT et le marché » avec les interventions de : Damien Dupont, Co-fondateur d’OpenGem, plateforme d’outils de sécurité et d’audit des NFT ; Marc-Olivier Bernard, Directeur Général de la société de ventes volontaires Boischaut ; Olivier Rivard-Cohen, Fondateur l’agence Caccio e Pepe, qui délivre des solutions stratégiques, techniques et créatives pour les marques désireuses d’emprunter le chemin des métavers ; Thierry de Baschmakoff, Fondateur de l’agence De Baschmakoff, agence de design thinking pour les marques de luxe ; Julien Ranquere, Co-fondateur de Tailor, place de marché de billetterie NFT. La table ronde a été suivie d’un débat avec le public.

En synthèse, les questions juridiques abordées lors de cette matinée débats ont porté sur les relations existantes entre les NFT et le droit de la propriété intellectuelle, d’une part, et le droit du sport et des jeux en ligne, d’autre part. Ces thématiques ont été précédées d’une présentation des NFT ou « jetons non fongibles ».

Un compte rendu détaillé sera publié prochainement.

VARET PRÈS KILLY tient à remercier chaleureusement une nouvelle fois à la fois les participants, ainsi que le public qui a répondu favorablement à notre invitation.

7. DOMAINE NATIONAUX & IMAGE DES BIENS : 16 domaines nationaux disposent désormais de la faculté de contrôler l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui les composent (Décret n° 2022-906 du 17 juin 2022 complétant la liste de l’article R. 621-98 du code du patrimoine et délimitant le périmètre de domaines nationaux, JO, 19 juin 2022).

Seize : c’est le nombre de domaines nationaux qui disposent désormais de la faculté de contrôler l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui les composent.

En vertu de l’article L. 621-42 du code du patrimoine issu de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine publiée au journal officiel le 8 juillet 2016, « l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui constituent les domaines nationaux, sur tout support, est soumise à l’autorisation préalable du gestionnaire de la partie concernée du domaine national. Cette autorisation peut prendre la forme d’un acte unilatéral ou d’un contrat, assorti ou non de conditions financières ».

La liste des domaines nationaux bénéficiaires de ce droit à l’image sur certains de leurs biens est déterminée par décret en Conseil d’État.
L’article R.621-98 du Code du patrimoine comportait initialement, en 2017, six domaines nationaux : le Domaine de Chambord ; le Domaine du Louvre et des Tuileries ; le Domaine de Pau ; le Château d’Angers ; le Palais de l’Élysée ; le Palais du Rhin.

Cette liste a été modifiée une première fois en 2021 avec l’ajout des 5 domaines nationaux suivants : le Palais de la Cité ; le Domaine du Palais-Royal ; le Château de Vincennes ; le Château de Coucy et le Château de Pierrefonds (Décret n° 2021-1174 du 10 septembre 2021 complétant la liste de l’article R. 621-98 du code du patrimoine et délimitant le périmètre de domaines nationaux).
Elle vient de nouveau d’être modifiée avec la désignation de cinq nouveaux domaines nationaux par décret n°2022-906 du 17 juin 2022 publié au Journal officiel du 19 juin 2022 : le Domaine du château de Villers-Cotterêts ; le Domaine du château de Compiègne ; le domaine de Meudon ; le Domaine du château de Malmaison ; le Domaine de Saint-Cloud.

Ces nouveaux bénéficiaires confirment, si besoin, que ce droit de para-propriété (intellectuelle) sur l’image de certains biens, est désormais bien établi, malgré les critiques initiales, notamment depuis que le Conseil constitutionnel, saisi le 2 novembre 2017 par le Conseil d’État (décision n° 411005 du 25 octobre 2017) d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par les associations Wikimédia France et La Quadrature du Net, en a validé le dispositif en considérant que « l’article L. 621-42 du code du patrimoine, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, est conforme à la Constitution » (Conseil constitutionnel, Décision n° 2017-687 QPC du 2 février 2018.)

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