RÉGULATION & PLATEFORMES EN LIGNE

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Le Règlement 2022/2065 du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques, plus connu sous son acronyme anglo-saxon « DSA» (pour Digital Services Act), sera applicable à l’ensemble des opérateurs de services numériques concernés le 17 février 2024 ; il est donc temps pour ces opérateurs de se préparer aux nouvelles obligations qu’il impose (Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE).

Grâce aux médias, chacun sait que certaines dispositions du Règlement relatif à un marché unique des services numériques, dit DSA, sont déjà applicables ; mais ces dispositions concernent, pour l’essentiel, les Très Grandes Plateformes et les Très Grands Moteurs de Recherche, selon la terminologie du Règlement, c’est-à-dire ceux dont le nombre mensuel moyen de « destinataires actifs » dans l’Union est supérieur ou égal à 45 millions.

Les autres opérateurs devaient simplement, depuis le 17 février 2023 et tous les six mois ensuite, publier en ligne cette moyenne mensuelle et la notifier au Coordinateur pour les services numériques de leur État membre d’établissement, à sa demande. Cette obligation vise précisément à permettre à la Commission européenne, directement en charge de la régulation des « Très Grandes Plateformes et des « Très Grands Moteurs de Recherche », de déterminer les opérateurs relevant de ce régime spécifique.

Pour le reste, les obligations créées par le DSA à la charge des opérateurs échappant à ce régime particulier, qui constituent l’immense majorité des fournisseurs de services de communication au public en ligne, entreront en vigueur le 17 février 2024. Il est donc temps de s’y préparer.

Rappelons brièvement que le DSA reprend à l’identique le régime de responsabilité limitée instauré au profit des prestataires intermédiaires (Fournisseurs d’accès et de transmission numérique, services de mise en cache et fournisseurs d’hébergement) par la directive du 8 juin 2000 dite « commerce électronique », mais crée également des nouvelles obligations à la charge de ces opérateurs (dont celle d’informer les autorités compétentes, qui leur adressent des injonctions d’agir à l’encontre de contenus illicites, des suites qu’ils donnent à ces injonctions).

Surtout, le DSA crée deux nouvelles catégories d’opérateurs, les plateformes en ligne et les moteurs de recherche en ligne, auxquels incombent des obligations supplémentaires.

C’est surtout la qualification de plateforme en ligne qui retient l’attention, car, définie comme un fournisseur d’hébergement qui, outre le stockage des contenus, assure leur diffusion en ligne, ce qui est pour le moins vague, elle s’applique à un grand nombre d’opérateurs du Web 2.0, des services d’intermédiation tels les sites d’annonces en ligne, aux services de partage de contenus (audio, photo, vidéo, mais aussi plateformes contributives en matière de littérature ou d’enseignement), sauf si la fonction de diffusion des contenus par les utilisateurs de la plateforme n’est que l’accessoire d’un service principal (par exemple, l’espace commentaires d’un service de presse en ligne).

Parmi les obligations à la charge de ces plateformes, on peut citer notamment :

  • L’obligation de mettre à la disposition de leurs utilisateurs des dispositifs de signalement des contenus ;
  • L’obligation de motiver leurs décisions restreignant l’accès à un contenu ou à un service ;
  • L’obligation de notifier à l’autorité compétente un soupçon d’infraction pénale ;
  • L’obligation de mettre en place un système interne de traitement des réclamations ainsi qu’un mécanisme de règlement extrajudiciaire des litiges ;
  • L’obligation de collaborer avec les « signaleurs de confiance » instaurés par le Règlement ;
  • L’obligation de lutter contre l’utilisation abusive de leur service, notamment en suspendant les utilisateurs fournissant fréquemment des contenus illicites ;
  • L’obligation, dite de transparence, de publier des rapports périodiques sur leurs activités de modération des contenus, qui doivent inclure des informations précises ;
  • L’obligation, inspirée du RGPD, de concevoir, organiser et exploiter leurs interfaces de manière qu’elles ne trompent ni ne manipulent leurs utilisateurs ;
  • L’obligation, renforcée par rapport à celle déjà existante, d’identifier comme telles les publicités diffusées ;
  • L’obligation d’indiquer dans leurs conditions générales les principaux paramètres utilisés par leurs systèmes de recommandation ;
  • L’obligation de protéger les mineurs en ligne ;
  • Enfin, les plateformes permettant à des consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels doivent assurer la traçabilité de ces derniers et leur fournir une interface leur permettant de respecter notamment leurs obligations précontractuelles d’information ; et, quand la plateforme a connaissance de ce qu’un professionnel propose un produit ou service illégal, elle doit, dans la mesure du possible, en informer les consommateurs.

On le voit, le respect de ces obligations impose aux opérateurs concernés de mettre en place un certain nombre de mesures, qu’il paraît judicieux d’anticiper dès à présent dans le cadre d’un plan d’action structuré.

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IA & PREMIÈRES RÉPONSES DE LA CNIL

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Dans un souci de conciliation entre innovation et respect des droits des personnes, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) propose certains aménagements à l’application des principes de protection des données énoncés par le RGPD pour les acteurs innovants de l’IA. La CNIL publie également des « fiches pratiques IA », qu’elle soumet à consultation publique jusqu’au 16 novembre 2023 (Communication de la CNIL du 11 octobre 2023 & consultation publique).

Étant donné que l’entraînement des algorithmes d’intelligence artificielle (IA) repose sur l’utilisation de vastes quantités de données, il est possible que certaines de ces données soient qualifiées de données personnelles dont le traitement fait encourir des risques aux droits des personnes concernées (entre autres, par la création de nouvelles formes de surveillance des individus, ou encore de fausses informations). D’où le jeu des dispositions protectrices du Règlement européen sur la protection des données personnelles (« RGPD »). Parallèlement, les professionnels du secteur ont fait part à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) de leurs préoccupations concernant les enjeux de cette protection, perçus comme un frein voire un obstacle à l’IA et ses développements.

C’est donc dans un esprit de conciliation entre innovation et respect des droits des personnes, que la CNIL publie une première série de lignes directrices où elle annonce que le développement de l’IA et le cadre protecteur du règlement européen précité sont bien compatibles, à condition de ne pas franchir certaines « lignes rouges ». Par-là, elle confirme l’application des principes de protection des données énoncés par le RGPD à l’IA, en assortissant cette application de quelques aménagements pour les acteurs innovants du secteur.

D’abord, concernant le principe de finalité qui exige que les données personnelles soient traitées uniquement à des finalités spécifiques déterminées à l’avance, la CNIL admet qu’un opérateur ne puisse pas définir à l’étape de formation de l’algorithme l’ensemble de ses futures applications lorsqu’il s’agit d’un système d’IA à usage général. Toutefois, le type de système et les principales fonctionnalités envisageables doivent être définies en amont.

Ensuite, concernant le principe de minimisation des données, en vertu duquel les données traitées doivent être limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées, la CNIL précise que ce principe n’interdit pas l’utilisation de grands ensembles de données aux fins d’entraînement des algorithmes. Toutefois, elle exige que les données utilisées soient sélectionnées aux fins d’optimisation de l’entraînement de l’algorithme, écartant ainsi l’utilisation de données personnelles inutiles. Des précautions et mesures de sécurité doivent également être mises en place.

Quant au principe imposant de limiter la durée de conservation des données à celle nécessaire à l’objectif du traitement, la CNIL déclare accepter des durées prolongées pour les bases de données d’entraînement, uniquement lorsque cela est justifié. Cette justification semble être directement liée à l’importance des investissements requis sur le plan scientifique et financier, sachant que ces bases « deviennent parfois des standards parfois largement utilisés par la communauté ».

Enfin, la CNIL précise que la réutilisation de bases de données est possible, notamment lorsqu’il s’agit de données accessibles publiquement. Cependant, l’autorité demande que la légalité de la collecte de données soit vérifiée et que la finalité de la réutilisation soit compatible avec la collecte initiale. Elle propose de s’inspirer des dispositions relatives à la recherche et à l’innovation du RGPD, offrant un « régime aménagé » aux acteurs de l’IA faisant utilisation des données des tiers.

L’autorité publie également des « fiches pratiques IA », qu’elle soumet à consultation publique jusqu’au 16 novembre 2023, afin d’assister les acteurs de l’écosystème IA dans la conformité de leurs bases de données d’apprentissage des systèmes d’IA, plus spécifiquement lors de la phase de développement (à l’exclusion de celle de déploiement). La publication des fiches définitives est prévue pour le début de l’année 2024.

Ce faisant, la CNIL entend poursuivre la mise en œuvre de sa stratégie de soutien à une IA innovante et respectueuse de la vie privée. Ces démarches s’inscrivent donc aux côtés de bien d’autres, telles que la création d’un service dédié à l’IA, la mise en place d’un plan d’action ou encore de programmes d’accompagnement dédiés à l’IA (tel que le bac à sable ou encore son dispositif d’accompagnement renforcé pour les scale-ups) – tous au service de l’objectif suivant énoncé par la CNIL : « faire émerger des dispositifs, outils et applications éthiques et fidèles aux valeurs européennes ».

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IA & ŒUVRES MUSICALES

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La Sacem annonce exercer la faculté d’« opt-out » reconnue par l’article L. 122-5-3, III du code de la propriété intellectuelle, qui permet de s’opposer au jeu de l’exception au droit d’auteur en matière de fouilles de données (Communiqué de presse de la Sacem du 12 octobre 2023).

Les outils d’IA, tels que ChatGPT ou Midjourney, s’appuient, durant la phase dite d’entraînement, sur un nombre considérable de données numériques préexistantes qui sont, le plus souvent, reproduites pour « nourrir » l’IA, et générer ensuite des résultats. Ces données sont susceptibles d’inclure des œuvres musicales, protégées par le droit d’auteur, en ce compris potentiellement des œuvres du répertoire de la Sacem.

Afin que les œuvres de ses membres ne soient pas utilisées sans son accord pour entraîner les outils d’IA, la Sacem, en tant qu’elle est seule habilitée à octroyer des autorisations d’exploitation desdites œuvres au titre des droits dont elle a la charge, a annoncé dans son communiqué qu’elle s’oppose pour l’avenir aux activités de fouilles de données (« data-mining ») sur son répertoire. La Sacem entend ainsi utiliser la faculté dite d’« opt-out » qui lui est reconnue par l’article L. 122-5-3, III du code de la propriété intellectuelle et qui permet de s’opposer au jeu de l’exception au droit d’auteur, prévue par ce même article, en matière de fouilles de données.

Cette décision de la Sacem s’inscrit dans le courant actuel de protection contre les risques de captation par les outils d’IA de la valeur des œuvres protégées par le droit d’auteur ou les droits voisins. A titre d’illustration, le Syndicat national de l’édition (SNE) a proposé en mai dernier, à ses membres qui souhaitent exercer leur faculté d’« opt out », un modèle type de clause à intégrer dans les conditions générales d‘utilisation de leur site ou les mentions légales de celui-ci.

Nous relèverons que ces initiatives reposent sur le postulat que l’exception au droit d’auteur en matière de fouilles de données serait applicable à la reproduction d’œuvres protégées en vue de l’entraînement de l’IA, ce qui peut être discuté.

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RÉGULATION & L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE (IA) PAR LE DROIT D’AUTEUR

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Une proposition de loi visant à encadrer l’intelligence artificielle par le droit d’auteur a été déposée le 12 septembre 2023 à l’Assemblée nationale. Un cycle de discussions a été ouvert, de sorte que la loi ne devrait pas être adoptée avant le printemps 2024 (proposition de loi visant à encadrer l’intelligence artificielle par le droit d’auteur du 12 septembre 2023 et instauration d’un Comité de l’intelligence artificielle générative le 19 septembre 2023).

L’objectif du texte est de « régler urgemment » l’intelligence artificielle (IA) afin de mieux faire respecter le droit d’auteur et partant assurer aux créations intellectuelles une protection efficiente.

Pris en urgence, le texte décline cet objectif sous la forme de trois séries de dispositions, énumérées en quatre articles et toutes placées sous le sceau de la conception personnaliste (ou humaniste) du droit d’auteur selon laquelle l’auteur d’une œuvre de l’esprit ne peut être qu’une personne physique, seule capable de concevoir une création intellectuelle qui lui est propre, reflétant sa personnalité, par la manifestation de choix libres et créatifs.

La première disposition énumère un principe fondamental du droit d’auteur, celui du nécessaire consentement préalable de l’auteur avant toute utilisation d’une œuvre de l’esprit. Il est ainsi proposé de modifier l’article. L. 131‑3 du code de la propriété intellectuelle portant sur les modalités de transmission des droits de l’auteur en y ajoutant que « l’intégration par un logiciel d’intelligence artificielle d’œuvres de l’esprit protégées par le droit d’auteur dans son système et a fortiori leur exploitation est soumise aux dispositions générales du présent code et donc à autorisation des auteurs ou ayants droit » (article 1er).

La deuxième disposition, qui serait introduite à l’article L. 321-2 du code de la propriété intellectuelle relatif aux organismes de gestion collective, est plus structurante. Elle pose un droit à rémunération et institue à cet effet un mécanisme de gestion collective des œuvres générées par l’IA qui serait facultatif. L’organisme compétent pourrait ainsi être habilité « à représenter les titulaires des droits et à percevoir les rémunérations afférentes à l’exploitation de la copie des œuvres, conformément aux règles établies par les statuts de ces sociétés » (article 2). La proposition de loi va plus loin : elle prévoit également d’instaurer une « taxation destinée à la valorisation de la création au bénéfice de l’organisme chargé de la gestion collective » dans le cas où « une œuvre de l’esprit est engendrée par un dispositif d’intelligence artificielle à partir d’œuvres dont l’origine ne peut être déterminée » (article 4).

La troisième disposition conduirait à une modification de l’article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle relatif au droit moral de l’auteur par l’ajout d’une précision selon laquelle « dans le cas où une œuvre a été générée par un système d’intelligence artificielle, il est impératif d’apposer la mention : « œuvre générée par IA » ainsi que d’insérer le nom des auteurs des œuvres ayant permis d’aboutir à une telle œuvre » (article 3). Il s’agit là d’une obligation de transparence, qui n’est pas sans lien avec celles figurant dans la proposition de règlement sur l’IA (« Artificial Intelligence Act ») adoptée le 21 avril 2021 par la Commission européenne.

La proposition de loi devrait avoir peu de chances d’aboutir en l’état. La Première ministre semble elle-même en convenir puisqu’elle a décidé d’instaurer, le 19 septembre 2023, le premier Comité de l’intelligence artificielle générative dont l’une des missions est précisément… de « définir une régulation adaptée pour protéger des dérives » de l’IA. Dans la foulée, en lien avec ce comité interministériel, la ministre de la Culture a constitué un groupe spécifique sur l’impact de l’IA dans le secteur culturel. Le comité interministériel et le groupe sectoriel doivent présenter leurs recommandations au Gouvernement d’ici six mois. Ces travaux devraient coïncider avec ceux engagés au sein de l’Union européenne. Le 14 juin dernier le Parlement européen a en effet voté le projet de réglementation sur l’IA. Un texte définitif devrait être adopté d’ici la fin de l’année par le « trilogue » rassemblant les trois institutions de l’Union européenne en vue d’une mise en œuvre avant les élections au Parlement européen en 2024.

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ENCADREMENT DES INFLUENCEURS SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX

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Jeudi 30 mars, l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (Proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux).

Les influenceurs sur internet sont devenus les nouveaux prescripteurs de notre monde numérisé. Ils seraient devenus si incontournables qu’ils menaceraient l’ordre public économique. C’est au nom de cet impératif que le Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté́ industrielle et numérique a souhaité que l’influence commerciale sur internet soit régulée. L’Assemblée nationale a été à l’unisson : une proposition de loi a été présentée et adoptée en première lecture et à l’unanimité le 30 mars 2023.

En adoptant la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, l’Assemblée nationale a ainsi ouvert la voie à une première régulation du « marketing d’influence » en France.

En substance, le texte règlemente l’activité d’influenceur commercial sur internet et les relations existant entre l’influenceur et son agent d’une part, ainsi qu’avec l’annonceur d’autre part ; il comporte enfin certaines mesures spécifiques relatives aux sites d’hébergement de contenus et autres plateformes en ligne ou encore s’agissant du jeune public.

La proposition de loi pose d’abord les bases d’un statut de l’influenceur commercial. Ce dernier est ainsi défini : « Les personnes physiques ou morales qui mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public par voie électronique des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique ».

Le texte rappelle que « les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’encadrement de la promotion des biens et des services ainsi que celles en matière de publicité sont applicables à l’activité d’influence commerciale par voie électronique définie à l’article 1er ». Il interdit encore plus spécifiquement toute promotion, directe ou indirecte, portant atteinte à la protection de la santé publique des actes, procédés, techniques et méthodes à visée esthétique. Il prohibe également la promotion de certains produits et services financiers (y compris crypto actifs) et celle de « produits illicites et contrefaisants », cette dernière interdiction étant toutefois curieusement limitée à la seule contrefaçon de marque, le droit d’auteur ou le droit des brevets n’étant pas visés expressément. Le non-respect de ces interdictions est pénalement sanctionné. Le texte règlemente également les communications par voie électronique relatives aux jeux d’argent et de hasard.

Outre ces interdictions, le texte pose des obligations d’informations à la charge des influenceurs afin d’identifier les promotions qu’ils réalisent de façon « claire, lisible et identifiable sur l’image ou la vidéo, sous tous les formats, durant l’intégralité de la promotion ». Selon le contenu du message, d’autres obligations doivent encore être respectées. Là encore le non-respect de ces différentes obligations d’information est pénalement sanctionné.

La proposition de loi concerne également l’activité d’agent influenceur. Le texte en donne une définition : « L’activité d’agent d’influenceur consiste à représenter ou à mettre en relation, à titre onéreux, les personnes physiques ou morales exerçant l’activité définie à l’article 1er avec des personnes physiques ou morales sollicitant leur service, dans le but de promouvoir des biens, des services, des pratiques ou une cause quelconque ». L’agent devra être vigilant puisqu’il est précisé qu’il doit « prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la défense des intérêts des personnes exerçant l’activité d’influence commerciale par voie électronique qu’ils représentent et pour éviter les situations de conflit d’intérêts ou d’atteinte au droit de la propriété intellectuelle ».

Le texte précise encore que les contrats conclus par l’influenceur tant avec son agent qu’avec les annonceurs doivent être conclus par écrit et qu’ils doivent comporter certaines mentions obligatoires (dont notamment la rémunération, en numéraire ou en nature), et ce à peine de nullité.

Le texte va plus loin et impose « la soumission du contrat au droit français, lorsque ledit contrat a pour objet ou pour effet de mettre en œuvre une activité d’influence commerciale par voie électronique visant principalement un public établi sur le territoire français ». Et lorsque l’influenceur est établi hors de l’Union européenne (Suisse et Espace économique européen compris), mais que son activité vise « même accessoirement, un public établi sur le territoire français », il doit alors « souscrire, auprès d’un assureur établi dans l’Union européenne, une assurance civile garantissant les conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile professionnelle ».

La proposition de loi soumet enfin l’activité des influenceurs aux règles applicables aux fournisseurs d’hébergement de contenus et autres plateformes en ligne auxquels il est fait obligation notamment de mettre en place les mécanismes permettant de signaler tout contenu illicite et de prendre les mesures nécessaires à la suppression desdits contenus illicites.

Des mesures spécifiques ont enfin été apportées s’agissant du jeune public, qu’il s’agisse de l’influenceur de moins de 16 ans qui ne peut faire la promotion de certains produits (boissons et produits alimentaires riches en sucre, en sel, en édulcorants de synthèse ou en matières grasses), de l’utilisation de l’image d’enfants sur les plateformes en ligne, ou encore d’actions de sensibilisation du jeune public face aux contenus.

Le texte doit désormais être examiné par le Sénat. Avant même son adoption définitive, un « Guide de bonne conduite : influenceurs et créateurs de contenu » a été publié sous l’égide du Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté́ industrielle et numérique.

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DONNÉES PERSONNELLES & TRANSFERT VERS LES ÉTATS-UNIS

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Dans un avis rendu le 28 février 2023, le Comité Européen à la Protection des Données (« CEPD »), prend acte des améliorations à la protection des données personnelles des citoyens européens résultant du nouveau cadre juridique adopté par le Président Joe Biden le 7 octobre 2022, mais dresse aussi la liste des sujets d’inquiétude qui persistent (CEPD, avis 5/2023 du 28 février 2023 sur le projet de décision d’adéquation relatif au cadre des transferts de données personnelles entre l’UE et les Etats-Unis).

On se souvient qu’à la suite de l’annulation du Privacy Shield, qui régissait le transfert de données personnelles entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, par la Cour de Justice, le 16 juillet 2020 (qui faisait elle-même suite à l’invalidation du Safe Harbor par la même Cour le 6 octobre 2015), en raison notamment de la faculté persistante, pour les services secrets américains, d’accéder massivement aux données personnelles des citoyens européens, le Président Joe Biden a adopté le 7 octobre 2022 un nouveau cadre juridique à de tels transferts, sous la forme d’un Executive order.

La Commission européenne a publié, en date du 13 décembre 2022, un projet de décision d’adéquation de cet acte législatif américain au droit européen, considérant donc que cet acte offrait des garanties suffisantes aux transfert de données personnelles des citoyens européens vers les Etats-Unis.

Néanmoins, avant d’adopter cette décision, la Commission a sollicité l’avis du CEPD, lequel est mitigé.

Si le CEPD, dont l’avis est consultatif, accueille favorablement l’introduction d’une exigence de nécessité et de proportionnalité dans le traitement des données personnelles par les agences américaines de renseignement, il dresse aussi une liste de points d’inquiétude, parmi lesquels l’exercice de certains droits des personnes une fois le transfert effectué, l’étendue des exceptions aux règles énoncées, la faculté temporaire de procéder à la collection de données « en vrac », et le fonctionnement effectif du mécanisme de recours.

In fine, le CEPD recommande à la Commission de subordonner sa décision d’adéquation à l’adoption, par l’ensemble des agences de renseignements américaines, de politiques et de procédures de mise en œuvre de l’Executive order préalablement évaluées et contrôlées par elle. A suivre, donc.

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L’AVOCAT MANDATAIRE SPORTIF & L’AGENT

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L’avocat mandataire sportif ne saurait mettre en relation en joueur et un club, intéressés à la conclusion d’un contrat relatif à l’exercice rémunéré d’une activité sportive ; il ne peut être rémunéré que par son client (Cour de cassation, 1e, 29 mars 2023, n° 21-25.335)

Par une délibération du 2 juin 2020 le conseil de l’ordre des avocats au Barreau de Paris avait souhaité modifier le règlement intérieur du barreau de Paris afin d’autoriser l’avocat mandataire sportif, d’une part, à mettre en relation un sportif et un club et, d’autre part, à permettre au premier de donner mandat au second de verser à l’avocat, en son nom et pour son compte, les honoraires correspondant à sa mission.

La délibération a fait long feu.

Elle a d’abord été retoquée par Cour d’appel de Paris par un arrêt du 14 octobre 2021 avant que la Cour de cassation ne siffle la fin du jeu. Par un arrêt du 29 mars 2023, la Cour de cassation a en effet considéré que « l’avocat ne peut, tant à titre principal qu’à titre accessoire, exercer l’activité d’agent sportif et que l’avocat agissant en qualité de mandataire de l’une des parties intéressées à la conclusion d’un tel contrat ne peut être rémunéré que par son client ». L’avocat a pour mission de représenter les intérêts de son client, il ne peut mettre en rapport les parties intéressées à la conclusion d’un contrat relatif à l’exercice rémunéré d’une activité sportive, ainsi que l’avait énoncé la Cour d’appel de Paris, sauf à prendre le risque d’un conflit d’intérêts.

La décision de la Cour de cassation a été brièvement commentée par notre associé Rhadamès Killy. La vidéo est accessible sur notre site internet.

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SPECTACLES & VENTE DE BILLETS SANS AUTORISATION

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Tout comme la vente de billets, la fourniture de moyens en vue de la vente de billets sans autorisation du producteur de spectacles est interdite. Google vient d’en faire récemment les frais (Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 1, 29 mars 2023, n° 21/00704)

Google a été condamné par un arrêt du 20 mars 2023 de la Cour de d’appel de Paris à verser au Prodiss, le Syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété, la somme de 300 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices portés à l’intérêt collectif de la profession, ainsi que la coquette somme de 60 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La condamnation a été prononcée sur le fondement traditionnel de la responsabilité civile (article 1240 du code civil) et de l’article 313-6-2 du code pénal qui interdit tant la vente ou l’offre de vente de billets que la « fourniture les moyens en vue de la vente ou de la cession des titres d’accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, de manière habituelle et sans l’autorisation du producteur, de l’organisateur ou du propriétaire des droits d’exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle ».

En cause le service Google Ads qui a fourni les moyens de la réalisation de vente de billets sans l’autorisation des titulaires des droits. Dans sa décision, la Cour rappelle que « Google Ads est un service de régie publicitaire offrant aux annonceurs la possibilité d’afficher des annonces sur le site du moteur de recherche Google.fr en fonction de mots-clés saisis par les internautes, un système d’enchères déterminant, sur la base des mots-clés choisis par l’annonceur, l’apparition de liens promotionnels dirigeant l’internaute vers le site de l’annonceur, la société Google Ireland, qui exploite le moteur de recherche Google.fr et qui met à disposition ce service Google Ads, étant rémunérée à chaque clic sur le lien promotionnel ». Or il a été établi que sur le site Google.fr ont été diffusées des annonces publicitaires en vue de la vente sur les sites Viagogo.fr, ticketstarter.fr, onlineticketshop.com, ticketbis.fr, stubhub.fr et rocket- ticket.com des billets des spectacles des artistes Artic Monkeys, Paul McCartney, Slash, Rammstein, Grand corps malade, Mylene Farmer, Drake et Metallica, sans autorisation des producteurs de ces spectacles.

Les condamnations prononcées sont lourdes, plus lourdes qu’en première instance (40 000 euros au titre des dommages intérêts ; 20 000 euros au titre des frais de justice : TJ Paris, 15 octobre 2020) ; elles l’ont été sans que la Cour d’appel considère nécessaire de faire droit à l’injonction de production de pièces sollicitée par le Prodiss.

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AUDIOVISUEL & ACCORDS INTERPROFESSIONNELS

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Deux accords interprofessionnels viennent récemment de consacrer des rémunérations minimales au profit des auteurs d’œuvres audiovisuelles (Arrêté du 22 février 2023 portant extension de l’accord du 23 janvier 2023 entre auteurs et producteurs d’œuvres audiovisuelles documentaires relatif à la rémunération minimale globale du dossier de présentation de projets documentaires de 52 minutes et plus ; Accord interprofessionnel sur les pratiques contractuelles entre auteurs-scénaristes et producteurs de fiction)

Un arrêté en date du 22 février 2023 a procédé à l’extension de l’accord interprofessionnel relatif à la rémunération minimale globale pour l’écriture de dossiers de présentation d’œuvres audiovisuelles documentaires. À l’occasion d’une précédente brève, nous avions fait état de cet accord signé le 23 janvier dernier entre les organisations professionnelles des auteurs (la GARRD, la Boucle Documentaire et la SCAM) et des producteurs (le SATEV, le SPECT, le SPI et l’USPA) qui, pour mémoire, a instauré le principe d’une rémunération minimale de 2.000 € bruts.

Dans la lignée de cet accord, pris sous l’égide de l’ordonnance du 12 mai 2021, transposant en droit français la directive du 17 avril 2019, un nouvel accord interprofessionnel est venu consacrer le principe d’une rémunération minimale au profit des auteurs. Le 22 mars 2023, à l’occasion du festival Séries Mania Forum à Lille, un accord relatif aux pratiques contractuelles entre auteurs-scénaristes et producteurs de fiction a ainsi été signé par quatre organisations professionnelles (la Guilde française des scénaristes, la SACD, le SPI et l’USPA) afin, notamment, d’instaurer une rémunération minimale des scénaristes de fiction au titre des travaux d’écriture.

À compter de sa date d’entrée en vigueur, prévue le 1er juillet 2023, cet accord a  vocation à s’appliquer à tous les contrats de droit français conclus entre auteurs-scénaristes et producteurs délégués en vue de la production d’œuvres de fiction en prises de vue réelles non destinées à une première exploitation cinématographique, à l’exclusion notamment des fictions quotidiennes feuilletonnantes, des œuvres de fiction interactives ou immersives et des œuvres de fiction exclusivement destinées aux réseaux sociaux.

Avec cet accord, les organisations professionnelles se sont entendues sur :

  • L’instauration d’un lexique définissant les différentes étapes d’écriture (fil à fil, traitement, séquencier, etc.), avec un encadrement du nombre de pages, de versions successives et d’échanges correctifs entre scénaristes et producteurs, ainsi qu’une définition modernisée de la bible de série originale ;

  • L’apparition au sein de ce lexique du concept d’atelier d’écriture structuré (ADES) – un cadre d’écriture collaboratif provenant des usages anglo-saxons ;

  • La mise en place d’une enveloppe minimale d’écriture (EME) garantissant qu’une proportion minimale de dépenses en droits d’auteurs sera affectée à la rémunération des travaux d’écriture de l’œuvre concernée ;

  • La consécration d’une disposition en matière d’échéancier de paiement aux termes de laquelle, dans le cadre d’un contrat de commande de texte et de cession de droits (hors ADES), au moins 70% de la rémunération totale de l’auteur lui sera versée au titre des étapes d’écriture successives ;

  • L’instauration d’un prix plancher pour l’écriture de la bible (6.000 € bruts dans tous les cas ; cette base minimale étant portée à 11.000 € bruts en présence d’une convention de développement signée avec un éditeur de services) ;

  • Le caractère obligatoire d’un mécanisme automatique de rémunération complémentaire après amortissement du coût de l’œuvre afin de mieux associer les scénaristes au succès des œuvres, notamment à l’international.

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DROIT MORAL & CHANSONS

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Le texte et la musique d’une chanson relèvent de genres différents et sont dissociables, en sorte que le seul fait que le texte ait été séparé de la musique ne porte pas nécessairement atteinte au droit moral de l’auteur (Cour de cassation, 1ère, 8 février 2023, n°21-23.976)

Cette décision de la Cour de cassation n’est pas révolutionnaire , mais met opportunément fin à une divergence entre la Cour d’appel de Versailles, qui avait jugé, il y a quelques années, que le texte et la musique d’une chanson n’étaient pas dissociables, en sorte que la publication du seul texte portait atteinte au droit moral de l’auteur (Versailles, 1ère Chambre, 19 novembre 2019, RG n°18/08181) et la Cour d’appel de Paris, qui a jugé le contraire dans une décision du 12 janvier 2021 (Pôle 5, chambre 1, décision qui faisait l’objet du pourvoi ayant donné lieu à l’arrêt rapporté), dans les deux cas à propos de chansons de Jean Ferrat.

La Haute juridiction approuve la solution de la Cour d’appel de Paris, et admet donc que les paroles d’une chanson puissent être publiées sans la musique, par exemple dans un ouvrage consacré à l’auteur compositeur (ce qui était le cas dans les deux litiges évoqués), ou au sein d’un recueil de paroles, sans que cette dissociation constitue, en soi, une atteinte au droit moral. Cette solution, de bon sens, mérite d’être approuvée.

Il reste que le contexte et les modalités de la publication des paroles ne doivent pas, eux, être de nature à porter atteinte au droit moral. En l’espèce, la Cour de cassation approuve également la Cour d’appel d’avoir admis l’exception de courte citation (qui constitue une exception au droits patrimoniaux, mais aussi, implicitement, au droit moral), dès lors que l’éditeur de l’ouvrage reproduisant des extraits des paroles de Jean Ferrat avait justifié de ce que chaque citation, qui « ne s’inscrivait pas dans une démarche commerciale ou publicitaire », était « nécessaire à l’analyse critique » de la chanson.

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