Dans le premier numéro de notre lettre d’information, nous avions signalé la question prioritaire de constitutionalité (QPC) transmise par le Tribunal judiciaire de Bobigny à la Cour de cassation le 15 décembre 2020 concernant la conformité à la constitution des textes du Code de la propriété intellectuelle (CPI) en matière de contrefaçon pénale de logiciel.
La QPC avait été soulevée dans le cadre d’un litige en contrefaçon opposant au pénal deux éditeurs de logiciels consécutivement à la plainte déposée par l’un de ces éditeurs, qui reprochait à l’autre d’utiliser sans son autorisation certains de ses logiciels.
La QPC était libellée en ces termes : « Les dispositions de l’alinéa 2 de l’article L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle disposant qu’est également un délit de contrefaçon la violation de l’un des droits de l’auteur d’un logiciel définis à l’article L. 122-6 portent-elles atteinte au principe de légalité des délits et des peines tel que garanti par les articles 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 27 août 1789 et 34 de la Constitution du 04 octobre 1958 dans la mesure où ce texte spécifique d’incrimination n’est assorti d’aucune peine ? »
En substance, l’auteur de la QPC considérait que le texte qui prévoit l’incrimination (article L. 335-3 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle) n’est pas assorti de sanctions dès lors que le texte qui les prévoit (article L. 335-2 CPI) ne vise pas expressément le logiciel.
Par arrêt du 9 mars 2021, la Cour de cassation a refusé de renvoyer au conseil constitutionnel la QPC. Selon la Cour de cassation, la question « ne présente pas un caractère sérieux dès lors que les dispositions de l’alinéa 2 de l’article L. 335-3 du [CPI] se bornent à étendre aux faits qu’elles décrivent, l’incrimination de délit de contrefaçon clairement réprimé par les peines indiquées à l’article L. 335-3 du même code ».
La solution était prévisible. Le texte d’incrimination a été édicté en 1994, date de transposition de la directive 91/250 CCE du 14 mai 1991 organisant la protection des logiciels par le droit d’auteur, alors que celui relatif aux sanctions est antérieur : il existe dans le code de la propriété intellectuelle depuis le 1er juillet 1992 et même avant la codification, avec l’ancien article 425 du code pénal. Or l’un renvoie « clairement » à l’autre, de sorte que le délit de contrefaçon de logiciel est bien prévu (art. L. 335-3 alinéa 2 CPI) et réprimé (article L. 335-2 CPI).
La procédure devant la chambre correctionnelle du Tribunal judiciaire de Bobigny devrait donc pouvoir reprendre.