Ce rapport tente de comprendre et de résoudre les difficultés suscitées par la règle jurisprudentielle selon laquelle incombe au demandeur à l’action en contrefaçon la charge de prouver, pour chaque œuvre dont il invoque la protection, qu’elle répond à la condition d’originalité, à laquelle est subordonnée, précisément, sa protection par le droit d’auteur.
Après avoir retracé l’origine de cette règle jurisprudentielle, somme toute assez récente, le rapport identifie les principales difficultés qu’elle pose : d’une part, la notion d’originalité, pourtant condition incontestable de la protection par le droit d’auteur, reste insaisissable ; d’autre part, l’essor de la contrefaçon de masse rend l’obligation de prouver l’originalité de chaque œuvre particulièrement lourde, et paradoxalement d’autant plus difficile à remplir que le nombre d’œuvres contrefaites est important.
Pour y remédier, le rapport invite d’abord à un assouplissement de la jurisprudence, d’une part quant à l’exigence d’établir l’originalité œuvre par œuvre, et d’autre part quant à la charge de la preuve, qui pourrait peser pour partie sur le défendeur, dans le respect des principes du droit de la preuve.
Faisant néanmoins le constat que la réalisation d’une telle inflexion jurisprudentielle est incertaine, le rapport propose enfin, dans la même logique, une intervention législative qui consisterait à ajouter un alinéa à l’article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle. Ce texte disposerait en substance qu’il appartient au défendeur contestant l’originalité d’établir que « son existence est affectée d’un doute sérieux », à charge pour le demandeur, « en présence d’une contestation ainsi motivée », « d’identifier ce qui caractérise » cette originalité. Une telle évolution permettrait d’éviter que certains contrefacteurs échappent à bon compte à la condamnation du fait de la difficulté matérielle, pour le titulaire du droit d’auteur, à justifier ab initio de l’originalité de nombreuses œuvres contrefaites. Pour cette raison, il serait souhaitable que le législateur la fasse sienne.